Sortir du piège du low cost

3 commentaires

  1. Bonjour,

    Merci pour cette vidéo, que je trouve super !

    Il y a juste un truc qui m’interpelle dans votre argumentaire — cela fait écho à un argument qu’on m’a rétorqué à un repas de famille quand je parlais de l’importance de produire localement. La question est : quid des travailleurs (et surtout travailleuses) dans le textile dans des pays comme le Bangladesh ? Si on produisait plus de vêtements localement en Europe (ou qu’on rendait les vêtements low-cost moins chers), alors a priori il y aurait moins de demande pour des vêtements low-cost, et donc moins d’argent pour mal payer des ouvriers et ouvrières au Bangladesh.

    Je suis bien sûr d’accord qu’exploiter des ouvriers et ouvrières, dans de mauvaises conditions et pour un salaire indécent, n’est pas du tout la manière idéale de soutenir le développement économique de ces populations ! Mais je n’arrive pas à m’empêcher de me demander : si on lutte contre le low-cost, si on travaille indirectement à réduire la demande pour le travail des gens dans les pays pauvres, comme le font Loom et En mode climat (et comme j’ai tendance à le faire à la petite échelle de ma propre consommation), est-ce qu’on a pas aussi une sorte de responsabilité pour que les personnes concernées puissent gagner de l’argent d’une autre manière ?

    C’est sans doute une question un peu naïve, mais la vidéo m’a fait repenser à cette histoire et je n’ai pas trouvé de réponse à ça dedans ni dans ce que j’ai lu de votre blog. Comme je me doute que vous y avez réfléchi, je me suis dit que je pouvais aussi bien poser la question histoire de savoir quoi dire au prochain repas de famille. 🙂

    Bonne soirée !

    1. Merci pour le retour post-repas de famille ! En effet, quand on prône la relocalisation de l’industrie, on peut parfois entendre cette réponse : « Et que faites-vous des ouvriers dans les pays du Sud qui risqueraient de perdre leur emploi ? ». C’est d’ailleurs un argument souvent utilisé par les entreprises du low cost. Pour tout vous dire, nous n’avons pas de réponse simple non plus, mais plutôt des pistes de réponse :
      – Avant toute chose, prôner la relocalisation de l’industrie, cela ne veut pas dire renoncer complètement aux échanges internationaux, mais simplement essayer de revenir à un peu plus d’équilibre, où on produit au moins certains de nos vêtements dans des usines sur notre territoire. On parle donc ici d’une transition qui laissera a priori largement le temps aux pays du Sud de s’adapter.
      – C’est un peu condescendant d’affirmer que les pays du Sud ne peuvent pas se sortir de la pauvreté sans les pays du Nord. Ne pourraient-ils pas développer des systèmes économiques plus indépendants des nôtres ?
      – Pour aller plus loin, est-ce qu’au contraire ce n’est pas cette situation de dépendance des pays du Sud vis-à-vis des pays du Nord qui ralentit leur développement ? Les marques qui produisent dans les usines sur place captent l’essentiel de la valeur, en cherchant à garder les prix le plus bas possible avec donc une forte pression sur les salaires sur place ? (ce que ces marques font en organisant une concurrence entre les différents pays et en menaçant toujours de délocaliser ailleurs). Et cela fait parfois des économiques très déséquilibrés : le textile représente 85% des exportations du Bangladesh, est-ce que cela permet vraiment au pays de se développer convenablement ?
      – En faisant fabriquer nos produits loin de la France, nous externalisons aussi la pollution : pollution des rivières, rejets toxiques des usines à charbon, etc. Est-ce vraiment responsable de faire cela ?
      – Tant qu’on fabrique nos objets très loin, on risque d’avoir un effet « loin des yeux, loin du coeur ». On risque d’être moins attentif aux conditions de production que si ces produits étaient fabriqués près de chez nous… Si on avait des proches ensevelis dans les décombres du Rana Plaza, est-ce qu’on achèterait toujours auprès des marques concernées ?

      Voilà, désolés, on a pas d’arguments-chocs mais vous pourrez piocher dedans pour votre prochain dîner 🙂

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