Avant de vous parler de polyester recyclé, laissez-nous vous présenter sa version « vierge » (c’est-à-dire non recyclée). Et pour cela, on voudrait vous montrer celle qui s’autoproclame la plus grande entreprise textile du monde : Hengli.
Si vous vous attendez à voir des milliers d’ouvrières sur des machines à coudre, c’est raté. Une usine de Hengli en Chine, ça ressemble plutôt à ça :
Deux supertankers qui déversent des millions de litres de pétrole dans une méga-usine, qui seront transformés au cours de lourdes étapes industrielles de raffinage ou vapocraquage jusqu’à obtenir… du polyester. Eh oui : le polyester, au départ, c’est du pétrole.
Et tout comme le pétrole alimente le secteur des transports depuis des décennies, le polyester est le carburant qui a fait exploser la croissance de l’industrie textile. Aujourd’hui, il représente plus de la moitié des fibres textiles utilisées dans le monde1.
Polyester : une croissance qui fait rêver Bruno Lemaire.
Comment expliquer une telle augmentation ?
Parce que le polyester a toujours été moins cher que le coton ? Comme beaucoup de monde, c’est ce qu’on croyait. Mais quand on regarde les chiffres, on se rend compte que ce n’est pas vrai. Jusqu’en 2010, les prix des deux matières étaient à peu près équivalents2 :
Évolution comparée des prix des fibres de polyester et du coton en Asie en US cents / Livre (cliquez ici pour accéder à l’analyse complète).
En fait, ce qui a surtout expliqué l’explosion du polyester, c’est qu’il permet de fabriquer, pour de nombreux usages, des vêtements plus adaptés que ceux en coton3 :
Des vêtements qui sèchent vite pour faire du sport : Nike, Adidas ou Décathlon en savent quelque chose
Des vêtements plus imperméables ou plus chauds, adaptés à l’extérieur : ce n’est pas pour rien que Patagonia ou The North Face étaient les premiers à en utiliser
Des vêtements plus techniques pour le quotidien : comme chez Uniqlo avec les technologies Heattech pour garder la chaleur ou Airism pour mieux respirer
Des tissus plus fluides et qui froissent moins, parfaits pour des robes ou des hauts pour femmes
Des matières qui se déforment moins, adaptés donc aux joggings ou aux leggings par exemple
Des tissus qui résistent mieux aux frottements et aux lavages, et donc largement utilisés dans les vêtements de travail, l’ameublement ou dans le domaine médical.
Etc.
Et la planète dans tout ça ?
A première vue, rien de dramatique. Pour évaluer l’impact environnemental des matières – et communiquer à leurs clients – la plupart des marques se réfèrent à l’indice Higg. Selon cet outil, le polyester serait une des matières les plus écologiques du monde… encore plus que le coton bio!
Comparaison de l’impact selon l’indice Higg pour différentes matières textiles (cliquez ici pour accéder à la source).
Ce n’est pas totalement incohérent : dans les giga-usines de polyester, le processus de fabrication est tellement optimisé et industrialisé que, ramené à l’échelle du vêtement, l’impact environnemental pourrait ne pas être si élevé.
Alors, c’est vrai, le polyester c’est écolo ?
Hélas non.
D’abord, cet indice Higg a beau être la référence utilisée par les marques du monde entier, il offre peu de transparence sur ses modes de calcul et manque de fiabilité. Selon une enquête récente, pour évaluer les impacts du polyester, il se base sur les données d’une usine européenne alors que l’immense majorité de la production a lieu en Asie, dans des conditions environnementales (et de travail) probablement moins glorieuses. D’ailleurs, suite à plusieurs critiques de certains médias et organismes, cet indice a officiellement été mis en pause mi-2022 en attendant que ses données et méthodes de calcul soient revues par des auditeurs indépendants.
Mais le principal problème de l’indice Higg, ce n’est pas son manque de fiabilité : c’est surtout ce qu’il ne mesure pas. Et en particulier trois choses.
1/ Fabriquer du polyester, c’est aussi fabriquer de l’essence
Retournons chez Hengli, l’entreprise chinoise de polyester. Quand ils raffinent du pétrole, ils n’obtiennent pas que du “naphta”, la base qui permettra d’obtenir du polyester. Ils obtiennent aussi certains liquides que nous connaissons tous : essence, gazole, fioul ou encore kérosène.
La machine pour raffiner le pétrole :une sorte de méga-alambic mais qui ne fait pas du whisky à la fin
Et tous ces produits-là, ils les revendent. En 2019, Hengli était même la première entreprise chinoise privée à avoir le droit de revendre du kérosène aux compagnies aériennes. Et chaque année, ils vendent plus de 6 millions de tonnes d’essence et de gazole, l’équivalent de plus de 10% de la consommation française (!)4.
Hengli est la parfaite illustration de la tendance actuelle dans l’industrie gazière et pétrolière5 : ce qui tire désormais la demande, ce sont les plastiques (et oui, le polyester c’est du plastique), qui représenteront plus de la moitié de la croissance du pétrole d’ici 2050. Quand le dictateur de l’Ouganda justifie la rationalité économique du très controversé pipeline EACOP de Total, il évoque… sa chemise en polyester et les débouchés économiques des matières synthétiques.
Qui aurait pu penser qu’une chemise jaune poussin servirait d’alibi à l’une des plus grandes bombes climatiques de notre époque ? Aaah la mode, la mode, la mode…
La fabrication des matières synthétiques, comme le polyester, génère donc des revenus pour l’industrie pétrolière. Cela soutient donc la production de l’essence ou du kérosène, alors que les énergies fossiles sont à l’origine de deux-tiers des émissions de CO2 du monde.
Mais le polyester a un autre co-produit presque aussi embêtant : la fast fashion.
2/ Sans polyester, pas de fast fashion
On connaît les conséquences écologiques dramatiques de la fast fashion et de ses 100 milliards de vêtements produits chaque année dans le monde, notamment à cause des gaz à effet de serre émis lors de leur fabrication : filature, tissage, teinture, confection…
Ce qui a permis la multiplication des H&M et des Zara, ce sont d’abord les prix dérisoires (obtenus par les délocalisations dans des pays à la main d’œuvre mal payée) et le renouvellement effréné des collections pour pousser à la consommation. Comme on l’a vu, ce ne sont pas les prix bas du polyester qui ont permis l’émergence de la fast fashion dans les années 90 et 2000 : jusqu’en 2010, les prix étaient similaires à ceux du coton.
Mais la fast fashion n’aurait jamais pu autant grossir s’il n’y avait pas eu profusion de polyester disponible sur le marché. Aujourd’hui, le synthétique représentent 64% des matières textiles. Si la fast fashion devait s’en passer – et le remplacer par du coton par exemple – il n’y aurait très probablement pas assez de matière naturelle pour maintenir ces niveaux de production : il faudrait y consacrer presque 7 % de nos terres arables (vs. 2.5% aujourd’hui), soit autant que pour la culture de tous les fruits et légumes de la planète. Difficile à concevoir dans un contexte de diminution de la fertilité des sols et de crise climatique.
Autrement dit, si ce n’est pas le polyester qui a permis au départ l’émergence de la fast fashion, c’est bien lui qui aujourd’hui lui permet d’exister. Il est le carburant qui fait tourner le moteur de cette mode rapide, la condition nécessaire pour produire toujours plus de vêtements.
Et on ne peut pas parler du polyester sans évoquer l’ultra fast fashion. Shein, le nouveau mastodonte de la mode mondiale, fabrique 85% de ses vêtements avec du polyester. Si cette marque chinoise a pu émerger il y a quelques années, c’est aussi grâce à la récente chute des prix du polyester, liée à la chute des cours de son principal composant (l’éthylène) générée par l’exploitation des gaz de schiste aux Etats-Unis. Sans gaz de schiste et sans polyester à très bas prix, cette ultra fast fashion n’aurait peut-être jamais pu exister.
Pas de schiste, pas de Shein.
Enfin, le troisième problème du polyester n’est pas lié à sa fabrication… mais à ce qu’il devient après.
3/ Le polyester et les microplastiques
Pour revenir à notre fameux indice Higg : on ne vous avait même pas encore tout dit (pas étonnant que son utilisation ait été mise sur pause). L’indice est basé sur une analyse du cycle de vie dite “crade-to-gate”, donc “du berceau à la porte de l’usine” : elle oublie donc la phase d’utilisation et la fin de vie des produits. Or pour le polyester, ces deux phases posent de graves problèmes.
D’abord, quand on les lave ou quand on les porte, les vêtements en polyester laissent échapper des millions de microplastiques qui se dispersent dans l’environnement6. Ces microfibres ont des conséquences encore incertaines mais potentiellement très dangereuses sur la biodiversité, la santé humaine… et même le réchauffement climatique.
Ensuite, la fin de vie des vêtements en polyester n’est pas très glorieuse non plus. Quand plus personne n’en veut, il n’y a que deux options :
Soit les vêtements finissent incinérés, ce qui génère des gaz à effet de serre. Comme le polyester est fabriqué avec du pétrole, c’est encore plus embêtant que d’incinérer un vêtement en coton (brûler du pétrole libère du CO2 enfoui depuis des millions d’années, alors que le cycle du carbone du coton est beaucoup plus court7 : en poussant, les plants de coton capturent du CO2). Sans compter certaines fumées potentiellement toxiques, notamment à cause de l’antimoine, un composé cancérigène présent dans le polyester et qu’on peut retrouver dans les cendres des incinérateurs.
Soit les vêtements finissent en décharge ou dans la nature, notamment en Afrique, qui reçoit plus de la moitié de nos vêtements usagés. Et le problème, c’est que le plastique n’est pas biodégradable dans l’environnement, contrairement au coton ou la laine. Inéluctablement, ces vêtements en polyester finiront par se décomposer dans les sols, siècle après siècle, en milliards de milliards de microplastiques (contrairement à ce qu’on pourrait croire, l’immense majorité des microfibres de polyester relâchées dans l’environnement vient de la fin de vie, pas de nos machines à laver). Comme l’explique la chercheuse Nathalie Gontard, les plastiques en décharge constituent une gigantesque bombe à retardement pour les siècles à venir.
Décharge textile à Nairobi, photo issue de l’excellent rapport Trashion (cliquez ici pour y accéder).
Bref, la peste ou le choléra.
Tous ces problèmes liés au polyester, les marques de fast fashion sentent que ce n’est pas très bon pour leur réputation… et au final, pas très bon pour les affaires.
Alors ils ont trouvé une solution magique. Nous avons nommé :
Chapitre 2 – Ce qui cloche avec le polyester recyclé
Une petite précaution avant d'entrer dans le vif du sujet. Nous ne voulons pas juger les petites et moyennes marques qui utilisent aujourd’hui du polyester recyclé. Le choix des matières est un sujet extrêmement complexe et il existe tellement de désinformation sur ce sujet qu’on peut tous tomber dans le panneau… Et nous les premiers : chez Loom, nous expliquions fièrement pourquoi on utilisait du polyester recyclé par exemple dans notre maillot de bain. Y voir clair au milieu de tout ça, c’est presque un boulot à plein de temps ! Et puis bien sûr, c’est très délicat pour une marque « éthique » de ne pas utiliser une matière qui semble écologique et que même la fast fashion utilise largement ! Qu’en penseraient ses clients ?
Le recyclage fait appel à un imaginaire très puissant. Quand on évoque ce mot, ce qui vient en tête, c’est le cycle magique de la nature : des plantes mortes se dégradent dans le sol et hop, les éléments nutritifs qui en résultent permettent à une nouvelle plante de pousser. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.
Comment notre cerveau imagine le recyclage :tellement magique qu’on se chanterait bien une petite BO du Roi Lion :“It’s the Ciiiiiircle of life”.
Un récent reportage tourné dans un magasin Primark montrait toute la puissance marketing des matières recyclées. Une cliente interviewée à la caisse explique :
“Ils nous disent que c’est du coton recyclé, donc ça vaut deux fois plus le coup. Je regrette moins d’acheter parce que je me dis que c’est bon pour la planète.”
En plus, le polyester recyclé est à peine plus cher que le polyester vierge8. C’est donc la matière absolument parfaite pour les marques : elle a l’air d’être écolo, elle fait vendre en déculpabilisant les consommateurs, sans être hors de prix.
Alors forcément, presque toutes les marques de fast fashion s’y sont mises : aujourd’hui, 8% des vêtements vendus dans le monde sont fabriqués avec du polyester recyclé. Soit 10 milliards de vêtements vendus chaque année.
Merci le polyester recyclé, qui permet aux marques d’avoir des milliards de mignonnes petites étiquettes comme preuves ultimes qu’elles sont devenues “éco-responsables”.
Même les pires élèves de la mode se sont tournés vers le polyester recyclé. Chez Primark, 45% du polyester est issu du recyclage. La marque Shein, dont on parlait plus haut, ne jure plus que par cela.
Quand on vous dit que le polyester recyclé ne coûte pas les yeux de la tête…
Aujourd’hui, c’est le polyester vierge qui est encore largement le socle de la fast fashion. Mais demain, ce pourrait bien être le polyester recyclé.
Selon un rapport de l’ONG Changing Market Foundations, qui a contacté 46 grandes marques pour connaître leur stratégie vis-à-vis des matières synthétiques, le polyester recyclé est “leur principale stratégie pour diminuer leur empreinte carbone”.
Mais est-ce vraiment la bonne stratégie ?
Vraiment pas.
D’abord, le recyclage industriel est assez loin du “cycle magique de la nature” dont on parlait plus haut. Certes, il évite d’avoir à extraire le pétrole puis de le raffiner. Mais il demande aussi pas mal de machines : transport, triage, lavage, broyage, fonte, extrusion pour faire un filament… et ces équipements ont besoin d’énergie et de matériaux. Si on se réfère au fameux indice Higg, qu’on ne peut pas soupçonner d’être contre le polyester, l’impact carbone d’un polyester recyclé très efficacement (de l’entreprise Repreve) ne serait que 42% inférieur à son équivalent non recyclé.
On dirait des petits lits à baldaquin mais ce sont des machines qui permettent l’extrusion du polyester… y compris recyclé.
42%, c’est quand même pas mal, non ? Sauf que pour fabriquer un vêtement en polyester recyclé, il faut ensuite passer par toutes les étapes habituelles : filature, tissage ou tricotage, teinture, confection, distribution… Et comme la matière première ne représente qu’environ 30% de l’empreinte finale, l’impact carbone d’un vêtement avec un très bon polyester recyclé n’est que 13% inférieur à son équivalent en polyester vierge9. Bon, c’est déjà ça… mais cet ordre de grandeur montre qu’il est difficile de dire que ce vêtement est “bon pour la planète”, pour reprendre les termes de la cliente Primark du reportage.
Mais ce n’est pas terminé.
D’abord, chimiquement, le polyester recyclé, c’est exactement la même chose que le polyester classique. Pour la phase d’utilisation et la fin de vie, c’est donc le même problème que le polyester vierge : relâchement de millions de micro-fibres plastiques dans la nature et/ou émission de gaz à effet de serre et de fumées toxiques lors de l’incinération.
Et ce qui est peut-être le problème le plus important, c’est que ce polyester recyclé… ne provient pas d’autres vêtements en polyester. Personne ne dispose aujourd’hui des solutions techniques pour recycler des vêtements en polyester à grande échelle, notamment parce que le polyester est souvent mélangé à d’autres matières (comme le coton ou l’élasthanne) et qu’il contient beaucoup d’impuretés (à commencer par la teinture).
En fait, 99% du polyester recyclé vient d’une source beaucoup plus simple à exploiter à l’échelle industrielle : les bouteilles en plastique en PET, qui se trouvent être constituées des mêmes molécules chimiques que le polyester. Pour vous donner une idée, avec 13 bouteilles en plastique, on fabrique assez de fil pour faire un t-shirt.
Rare image d’un t-shirt Primark, collection 2028.
“Bah il vaut mieux que ces bouteilles en plastique finissent en fils de polyester que sur des plages ou dans des décharges à ciel ouvert, non ?”
Excellente question Jean-Michel.
Quand les marques de fast fashion expliquent que le polyester recyclé vient des bouteilles plastiques, elles entretiennent souvent l’illusion qu’elles évitent que les bouteilles en plastique ne viennent polluer l’environnement. Le principal fournisseur de fil de polyester recyclé (Unifi) explique d’ailleurs sur son site : “nous avons créé ce fil pour créer un monde plus durable où nous évitons à des milliards de bouteilles en plastique de finir dans les décharges ou les océans”.
C’est émouvant… mais la vérité est toute autre.
Si ces bouteilles n’avaient pas été utilisées pour fabriquer du polyester, elles auraient en fait permis de fabriquer… d’autres bouteilles en plastique. La réalité, c’est que l’industrie textile récupère des bouteilles plastiques recyclables plusieurs fois pour les transformer en vêtements, qui eux, ne seront pas recyclables à grande échelle.
D’ailleurs, la filière des bouteilles en plastique est très en colère contre l’industrie textile, qui lui pique la majorité de ses bouteilles pour fabriquer du polyester “recyclé”10. Le fait que l’industrie textile récupère autant de bouteilles empêche l’industrie des bouteilles d’atteindre ses propres objectifs de recyclage. Elle réclame donc de pouvoir accéder à ses propres bouteilles avant les autres filières. Nicholas Hodac, le directeur de l’association des sodas européens, témoignait récemment : “Utiliser les matières de quelqu’un d’autre – comme le fait l’industrie textile avec les bouteilles PET – ce n’est pas de la circularité. […] C’est du décyclage.” Depuis quelques mois, la filière des bouteilles en plastique essaie même de développer sa propre infrastructure de collecte dans les rues pour être sûr de récupérer un maximum de bouteilles et éviter qu’elles ne finissent dans le textile. Même l’Union Européenne vient de l’affirmer dans sa récente stratégie pour les textiles durables : “Une telle pratique n’est pas en ligne avec le modèle circulaire des bouteilles en plastique”. D’ailleurs, une directive européenne va obliger à avoir un taux d’incorporation minimum de plastique recyclé de 25% dans les bouteilles dès 2025.
Visuel de la campagne “Rendez-nous nos bouteilles” : la filière bouteille est fâchée.
Bref, peut-être qu’un jour, l’industrie textile ne pourra plus avoir accès à ce gisement de bouteilles pour les « recycler » en vêtements… Preuve supplémentaire que ce polyester recyclé à partir de bouteilles n’est pas une solution magique au problème environnemental du textile. Au contraire, il agit plutôt comme un écran de fumée qui retarde la prise de conscience… et nous détourne des vraies solutions.
Alors quelles sont-elles ? Comment fait-on pour avoir une industrie textile qui permette d’habiller la planète sans la détruire en même temps ?
Chapitre 3 – La solution, la réduction
D’abord, pourrait-on imaginer un recyclage du polyester en boucle fermée, avec du polyester issu de vieux vêtements ?
Pour l’instant, cette pratique est quasiment inexistante: aujourd’hui, seuls 0,18% des vêtements sont fabriqués avec des matières recyclées à partir d’autres vêtements. Et selon un rapport de l’ONG Changing Market Foundations en 2021, aucune des 46 grandes marques interrogées n’avaient pour objectif de développer le recyclage en boucle fermée.
Pourtant, il existe un certain nombre de projets de ce type qui donnent de l’espoir. Et cocorico, la France n’est pas trop mal placée sur ce sujet. L’entreprise Carbios affirme pouvoir recycler 90% du polyester présent dans les vêtements grâce à une méthode dite “enzymatique” et construit en ce moment une usine pilote en Meurthe-et-Moselle. Et l’américain Eastman va investir un milliard de dollars pour construire d’ici 2025 la plus grande usine de recyclage “chimique” de polyester du monde près du Havre (elle accueillera avant tout des emballages en PET mais annonce aussi pouvoir recycler du polyester textile).
L’usine de recyclage d’Eastman au Tennesseequi accueillera bientôt un site de recyclage chimique comme au Havre(bientôt on aura tous quelque chose “sur” nous de Tennessee).
Mais est-ce que ce recyclage du polyester en boucle fermée suffirait à rendre l’industrie textile vertueuse?
Malheureusement non.
D’abord, il existe encore une grande part d’incertitude sur la capacité de ces projets à recycler du textile à grande échelle en termes de coûts et d’énergie. Par exemple, l’enquête publique de la giga-usine Eastman nous apprend qu’elle espère recycler moins de 3% des volumes mis sur le marché en France10. Mais surtout, il s’agit d’un objectif assez théorique dans la mesure où Eastman reconnaît que “la pureté et la conception des textiles est un défi” et ciblerait d’abord… des “ceintures de sécurité 100% polyester”. On est encore loin de pouvoir recycler des t-shirts Shein ou des robes H&M.
Mais plaçons-nous dans un monde idéal où le recyclage du polyester est proche de la perfection. Imaginons que :
la moitié du polyester textile provient d’autres vêtements en polyester (pour rappel, c’est moins de 1% aujourd’hui)
le recyclage chimique ou enzymatique est ultra-efficace et permet d’avoir un impact climatique du polyester recyclé 70% inférieur à celui du vierge (ce qui est très, très optimiste)11
Dans ces conditions idéales, comme la matière ne représente que 30% de l’impact (par rapport à la fabrication du vêtement en tant que telle), la réduction de l’impact climatique pour l’ensemble de la fabrication de vêtements en polyester serait alors de… 10%13.
10% ? C’est à peine plus que le taux de croissance de la vente de vêtements en polyester dans le monde prévu pour l’année prochaine.
Autrement dit, en termes d’impact climatique, si on réussissait l’exploit technologique et industriel de déployer des usines de recyclage de polyester de vêtements dans le monde entier, ce serait juste comme si on avait stabilisé la croissance des vêtements en polyester pendant… un an. C’est d’abord pour ça que le polyester recyclé est un écran de fumée : le mot « recyclé » nous donne l’illusion qu’on résout le problème de pollution de l’industrie textile alors qu’on n’est pas du tout sur les bons ordres de grandeur.
Bref, si le recyclage en boucle fermée ne s’accompagne pas d’une réduction drastique de la consommation de vêtements en polyester, ce sera juste un coup d’épée dans l’eau.
En fait, c’est le moment de se souvenir de la bonne vieille règle des trois R : pour réduire l’impact écologique des vêtements, avant de les recycler, il faut d’abord ré-utiliser et encore mieux, réduire.
La pyramide des 3R : recycler, oui, mais seulement en dernier recours.
Mais concrètement, comment on fait ?
D’abord, la ré-utilisation.
La plupart de nos vêtements peuvent avoir une deuxième vie, à condition de les entretenir et les réparer un maximum. Si vous avez peur des aiguilles (à coudre), des milliers d’ateliers de retouche sur tout le territoire n’attendent que vos vêtements.
Mais il existe une autre forme de réutilisation, à mi-chemin entre le recyclage et l’upcycling, et sur lequel on pourra peut-être bientôt compter : des usines qui trient automatiquement nos vieux vêtements par composition et par couleur, puis les effilochent pour refaire des fils qu’il n’y aura pas besoin de re-teindre (ce qui évite donc la phase de teinture, très consommatrice en énergie). Ça, c’est le projet du CETI, un centre de recherche textile près de Lille, en partenariat avec plusieurs usines françaises. Certes, les fils obtenus sont pour l’instant moins parfaits que les fils issus de matière vierge, mais l’initiative mérite d’être soutenue.
Enfin (et surtout), la réduction ! Pour réduire l’impact écologique de la mode, tout le monde a un rôle à jouer.
Ce qu’on peut faire en tant que marque :
Le polyester représente la moitié des fibres textiles mondiales, et cette proportion grandit d’année en année. Certes, c’est pratique pour faire des vêtements de sport qui sèchent vite… mais a-t-on vraiment besoin de l’utiliser pour fabriquer des robes ou des t-shirts ? Idéalement, il faudrait utiliser les matières synthétiques dans les proportions les plus faibles possible, et quand il n’y a vraiment pas d’alternative.
Pour les vêtements qui nécessitent l’utilisation de matières synthétiques, on peut continuer à utiliser du polyester recyclé (qui reste un tout petit peu moins pire que sa version vierge). Mais il ne faut pas oublier les ordres de grandeur et donc éviter de mettre en avant les supposées vertus de cette matière : par effet de halo, cela pourrait laisser penser aux clients que ce vêtement est « bon pour la planète ».
Se concentrer sur l’essentiel : éviter de produire à l’autre bout du monde, ne pas renouveler ses collections tous les 2 jours, etc.
Ce que peut faire l’Etat :
Accorder à la filière bouteille la primeur de l’accès à son propre plastique, comme le demandent de nombreuses ONGs. Si elle n’a plus accès au polyester recyclé issu de bouteilles, l’industrie textile ne pourra plus se cacher derrière cette solution et sera obligée de se poser des vraies questions pour réduire son impact écologique.
Pénaliser le polyester vierge (et toutes les autres matières d’origine fossile) dans les prochaines réglementations, en particulier dans l’affichage environnemental qui sera bientôt déployé en France puis en Europe. C’est loin d’être gagné car l’affichage environnemental européen est coordonné par l’organisme à l’origine de l’indice Higg, celui-là même qui estime que le polyester est une des matières les plus écologiques du marché.
Pénaliser les pratiques commerciales de la fast fashion, qui génèrent toujours plus de surconsommation. Avec des centaines d’autres marques, c’est ce pour quoi nous nous battons à travers la coalition En Mode Climat.
Privilégiez les matières naturelles, surtout si elles sont issue d’une agriculture raisonnée et/ou locale : il y a plein de cas où on peut facilement se passer de polyester ou autres matières synthétiques. Et elles seront toujours préférables au polyester pour les vêtements que vous portez à même la peau en raison de leur meilleure résistance aux odeurs (sous-vêtements, t-shirts, chemises, etc.)
On a tous envie de croire que la solution à la crise environnementale peut se trouver dans une simple invention technique : un gigantesque aspirateur à CO2 pour continuer à brûler des énergies fossiles, des avions à hydrogène pour continuer partir en week-end à New-York… et du polyester recyclé pour continuer à acheter toujours plus d’habits. Les vraies solutions au problème du textile sont à la fois plus simples mais aussi plus difficiles à avaler pour les géants des vêtements : ils doivent d’abord renoncer à vendre toujours plus. Et pour vous, ça veut dire acheter moins de vêtements et chouchouter ceux que vous possédez déjà. Le combat écologique commence peut-être devant nos machines à laver…
Et les matières synthétiques chez Loom ? Nous essayons d’utiliser un maximum de matières naturelles mais il nous arrive d’insérer un peu de matières synthétiques, quand cela permet d’augmenter significativement la durée de vie de nos vêtements. Elasthanne : nous mettons un petit peu d’élasthanne dans nos pantalons en coton, nos sous-vêtements et dans les bords-côtes de nos pulls et sweats en coton pour limiter la déformation dans le temps. Polyamide : nous utilisons du polyamide pour renforcer nos chaussettes, notre t-shirt en mérinos et notre sac à dos. Polyester : nous utilisons du polyester dans notre maillot de bain (car nous ne voyons pas par quoi le remplacer), un petit peu dans notre jogging (pour limiter sa déformation) et dans notre chino, sous la forme d’élastomultiester (pour limiter le pochage).
Qui on est pour dire ça ? Vous êtes sur La Mode à l’Envers, un blog tenu par la marque de vêtements Loom. L’industrie textile file un mauvais coton et c’est la planète qui paye les pots cassés. Alors tout ce qu’on comprend sur le secteur, on essaye de vous l’expliquer ici. Parce que fabriquer des vêtements durables, c’est bien, mais dévoiler, partager ou inspirer, c’est encore plus puissant. On ne fait jamais de pub : si vous aimez ce qu’on écrit et que vous en voulez encore, abonnez-vous à notre newsletter en cliquant ici. Promis, on vous écrira maximum une fois par mois.
Notes
1 En France, les textiles collectés en fin de vie montrent une plus faible part du polyester (seulement 19%). Selon Refashion, deux grandes raisons peuvent expliquer cet écart : « la production mondiale de textiles n’est pas exclusivement destinée à l’habillement (une multitude d’usages techniques, dans le bâtiment ou les articles de sport, par exemple, accaparent des textiles synthétiques) ; et les habits synthétiques sont potentiellement peu collectés car ils s’usent moins rapidement ou sont jugés de moindre valeur (donc jetés avec les ordures) ».
2 Certes, le coton génère un peu plus de perte lors de la filature à cause des impuretés et fibres trop courtes, mais la différence de perte avec le polyester est d’environ 8%, donc un impact sur le prix du vêtement inférieur à 1%. Insuffisant pour expliquer l’explosion de l’usage du polyester.
3 Pas dans tous les cas : le coton est plus adapté pour des vêtements près du corps comme les t-shirts et les sous-vêtements, pour des vêtements qu'on veut moins brillants comme les chemises ou les jeans, etc. Sans oublier les autres matières naturelles, comme la laine plus adaptée pour les vêtements chauds.
5 Certes, Hengli est un peu un cas à part. La plupart du temps, ce sont les raffineries classiques qui revendent le naphta aux usines de polyester : le polyester est donc d’abord un co-produit de l’essence (et non l’inverse).
6 C’est la même chose pour les fibres cellulosiques, comme le coton, mais les fibres de coton sont plus facilement biodégradables dans l’environnement (dans la terre mais pas forcément dans l’océan où les études semblent montrer que les fibres de coton teintes sont peu biodégradables).
7 Cela ne signifie pas non plus que l’énergie issue de l’incinération des vêtements en coton doive être considérée comme renouvelable : il a fallu utiliser beaucoup d’énergie lors de leur fabrication.
8 Le prix des granules de polyester recyclé est même inférieur à celui des granules vierges. Mais les marques utilisatrices de polyester recyclé nous ont communiqué qu’il restait légèrement plus cher à l’achat, sans doute à cause des volumes de production plus faibles que le polyester vierge et donc aux plus faibles économies d’échelle.
11 L’enquête publique parle de « 20 000 tonnes de déchets textiles à horizon 2028 ».
12 Il existe encore peu d’études d’analyse de cycle de vie de polyester « fiber-to-fiber »… Mais par exemple, les première études sur le recyclage enzymatique comme celle-ci présentent un bilan écologique pire que pour le polyester vierge. Cette synthèse sur le recyclage chimique n’est également guère enthousiasmante.
13 Gain environnemental = % vêtements recyclés * % à allouer matières premières * gain climatique du recyclage = 50% * 30% * 70% = 10%
Il n’est pas nécessaire d’avoir chez vous les savons détachants les plus improbables (fiel de quoi ?) ou de casser votre tirelire pour vous offrir la machine à laver la plus chère du marché. Il n’y a qu’une seule chose à faire :
Oui. Où que vous soyez. Même si cela implique parfois de passer la fin de votre repas trempés jusqu’à l’os à cause d’une tache de vin.
Pour convaincre les plus cartésiens
J’ai taché 4 tissus en coton numérotés de 1 à 4 avec les 3 types de tâches qui existent : les taches grasses (huile d’olive), les taches enzymatiques (chocolat noir fondu) et les taches oxydables (du vin rouge) afin de répondre aux deux questions suivantes :
Est-ce que c’est si grave que ça d’attendre quelques jours avant de laver un vêtement taché ?
Faut-il frotter la tache avec du savon avant de passer le vêtement en machine ?
Pour cela j’ai lavé différemment mes 4 tissus :
Le tissu n°1 n’a pas été savonné, mais a été lavé en machine dans l’heure suivant la tache
Le tissu n°2 a été savonné immédiatement, puis lavé en machine dans l’heure
Le tissu n°3 n’a pas été savonné, puis a été lavé en machine 7 jours après la tache. Pourquoi 7 jours ? Car je fais une machine de vêtements par semaine donc il peut arriver qu’un vêtement taché patiente 7 jours dans mon panier à linge sale (même si c’est une extrêmement mauvaise idée hein)
Le tissu n°4 a été savonné immédiatement, puis lavé en machine 7 jours après
Et voici le résultat après lavage en machine et séchage à l’air :
La conclusion est implacable : le tissu n°2 est presque nickel. Voici donc mon meilleur conseil quand vous êtes face à une tache : savonnez immédiatement et faîtes une lessive le plus vite possible.
Si vous ne pouvez pas faire de lessive tout de suite, pensez quand même à savonner la tache immédiatement : les deux tissus savonnés (le n°2 et le n°4) sont sortis de la machine plus propres que les deux autres (il faudra me croire sur parole car ce n’est pas évident sur la photo). Et si vous le pouvez, faites également une lessive rapidement : les deux tissus lavés 7 jours après la tache (le n°3 et le n°4) sont moins bien détachés que les deux autres. C’est particulièrement visible pour les taches oxydables (les taches de vin en bas) et pour les taches enzymatiques car le chocolat a piqué le tissu en moisissant (glop).
Quel savon utiliser ?
Pour vous conseiller au mieux avec mes articles d’entretien, je fais régulièrement des recherches pour détecter les tendances en matière d’entretien (ou parfois les grosses arnaques) et ajouter des produits à ma longue liste de choses à tester. En plus, les commentaires regorgent de pépites, comme ici au sujet d’un savon détachant :
Vos fils peuvent détacher leurs slips eux-même Valérie.
Comme je vous le disais plus haut, je n’ai pas constaté de différence d’efficacité entre les différents savons que j’ai testés, que ce soit des savons “spécial taches” (comme le savon au fiel de boeuf ou le savon à base de terre de Sommières) ou des savons archi-basiques trouvables en supermarché pour trois francs six sous.
Alors tant qu’à faire, achetez plutôt des savons fabriqués localement. Nous avons la chance d’avoir en France des savonneries qui produisent encore du savon de manière artisanale, comme par exemple la savonnerie Fer à Cheval à Marseille (on vend d’ailleurs un de leurs savons sur le site de Loom). Ils sont fabriqués au chaudron à partir d’huile de grignons d’olive : c’est la deuxième pression des olives car la première donne l’huile d’olive alimentaire. Mais n’importe quel petit bout de vieux savon fera donc l’affaire TANT QUE VOUS SAVONNEREZ VOS TÂCHES IMMÉDIATEMENT AVANT DE LES LAVER EN MACHINE.
PS : Pour les taches de gras, le liquide vaisselle fera aussi très bien l'affaire. Mais veillez à le prendre transparent pour ne pas qu'il laisse la zone colorée.
Qui suis-je pour vous parler d’entretien de vos vêtements ? Je m’appelle Claire et je suis en charge de suivre la production chez Loom. En gros, j’essaye d’éviter les ruptures de stock sur notre site (bon c’est pas encore parfait, mais j’y travaille) et je m’assure tout au long des étapes de fabrication que les vêtements sont conformes à nos exigences de qualité. En plus de ça, je suis passionnée par tout ce qui permet d’allonger la durée de vie de nos vêtements : entretien, réparation et autres astuces de grand-mère. J’aime donner des “petits suppléments d'âme” aux vêtements, les retravailler, les réparer, leur redonner une chance quand plus personne ne veut d’eux. Sur ces pages, j'essaierai de vous transmettre ce que je sais et qui pourrait vous être utile. Dernière chose : toutes les astuces que vous trouverez sur ce site, je les ai vraiment testées et je me suis assurée personnellement qu’elles marchent (en d’autres termes, ce n’est pas un copié-collé de recherches sur internet). Si vous en avez des nouvelles à me suggérer, n’hésitez pas à laisser un commentaire en dessous de cet article.
La mite textile, anciennement appelée teigne des vêtements (ET C’EST BIEN MÉRITÉ), est un papillon de nuit dont les larves se nourrissent de kératine. Leur rôle dans l’écosystème est normalement de décomposer les parties des cadavres d’animaux qui se dégradent le plus lentement : peau, fourrure, griffes, cornes, sabots… On est donc plein de gratitude pour ces petites larves extrêmement utiles, mais on préférerait qu’elles laissent nos pulls en laine tranquilles.
Avant de ranger vos vêtements d’hiver, il faut donc vous assurer qu’aucune mite n’a élu domicile dans votre armoire. Voilà plusieurs pistes pour en avoir le coeur net :
Dans votre placard : - en fouillant dans votre dressing, ou en secouant vos pulls, des petits papillons argentés se sont envolés (une mite textile mesure un peu moins de 1 cm de long), - vous avez trouvé dans les recoins de votre placard des cocons blancs à l’apparence cotonneuse (spoiler : ce sont des cocons de mites),
Sur vos vêtements : - vous avez repéré des trous assez caractéristiques : c’est comme si vous aviez arraché une maille mais sans que des fils ne dépassent du trou, - l’un de vos pulls présente plusieurs trous dans la même zone, - les trous sont irréguliers et pas très grands (environ 0,5 cm de diamètre) et apparaissent sur les matières animales, surtout sur la laine ou la soie.
Les experts sont formels : une mite est passée par là.
Si vous avez répondu positivement à l’une de ces affirmations, prenez votre courage à deux mains et suivez la guide :
Comment se débarrasser des mites
Ou plus précisément : comment se débarrasser des larves de mites car comme nous l’expliquions plus haut, ce sont les larves de mites qui se nourrissent de kératine et qui font les trous dans vos pulls. Les mites adultes, quant à elles, ne mangent pas : elles ont une espérance de vie d’une dizaine de jours pendant lesquels leur seul objectif est de trouver un endroit propice pour pondre. #mumlife #proudmama
Les larves de mite craignent le mouvement et leur instinct de survie peut les amener à se cacher dans n’importe quel vêtement ou recoin (même si elles ne mangent que les matières animales in fine). Je vous conseille donc de traiter tous les vêtements rangés à proximité de vos lainages troués ainsi que votre placard pour être sûrs d’éliminer toutes les larves. Voici comment procéder :
Pour les vêtements fragiles ou en laine, laissez-les au congélateur pendant 72 heures puis lavez-les en programme laine à 30°C - le froid et l’eau devraient les tuer,
Pour les vêtements qui le tolèrent (comme les vêtements en coton par exemple), lavez-les à 60°C puis séchez-les au sèche-linge, ou repassez-les – la chaleur aura raison de leur volonté de nuire,
Aspirez votre placard de fond en comble, en insistant sur les recoins, pour éliminer les cocons de mites,
Saupoudrez de la terre de diatomée dans les angles de votre placard afin d’éliminer les larves qui pourraient s’y cacher et que vous n’auriez pas réussi à aspirer. C’est de la poudre d’algue trouvable en supermarché qui joue le rôle d’insecticide mécanique. Pensez à l’aspirer au bout d’une semaine car elle peut être irritante à long terme et bien entendu, pensez à lire les contre-indications au dos du flacon,
En complément, pour être certains d'être tranquilles, vous pouvez utiliser des pièges à mites imprégnés de phéromones qui attirent les mites mâles restantes qui vont venir s'y coller : ça devrait donc stopper la reproduction de ces petites bébêtes.
Aucune mite ne vous résistera.
Une fois que vous avez fait tout ça, vous pouvez à nouveau ranger vos vêtements dans votre armoire le cœur léger. Mais ne criez pas victoire trop tôt : il faut désormais vous assurer que les mites ne reviennent pas.
Comment éviter que les mites ne s’installent chez vous
Pour tenir les mites à l’écart de votre dressing, il y a quelques trucs à savoir :
D’abord, les mites adorent l’obscurité et détestent le mouvement – oui je l’ai déjà dit mais c’est très important alors je le répète. Évitez donc de laisser des pulls inutilisés pendant des années dans un placard. Portez-les souvent et évitez d’acheter des pulls dont vous n’avez pas besoin.
Ces bestioles raffolent des odeurs corporelles. Pensez à bien aérer votre pull en fin de journée après l’avoir porté, par exemple sur le dossier d’une chaise.
Glissez du bois de cèdre dans votre pile de pulls pour éloigner les mites. Versez dessus une goutte d’huile essentielle de cèdre tous les trois mois pour ne pas qu’il perde son odeur (et donc son efficacité).
Pourquoi le cèdre est le meilleur des anti-mites
Pour éloigner ces bêtes destructrices de dressing, on utilisait historiquement des boules de naphtaline, jusqu’à ce qu’on se rende compte qu’elles étaient irritantes pour la peau, les muqueuses oculaires et les voies aériennes chez l’homme (particulièrement chez l’enfant) et qu’on interdise leur commercialisation en 2008.
En l'absence de naphtaline, il faut s’en remettre au répulsif naturel le plus connu contre les mites textiles : le bois de cèdre, qui contient plusieurs types d’alcools tueurs de larves (après tout, c'est comme ça que le cèdre se protège lui-même des insectes susceptibles de le dévorer). Dès 1682, on trouve des écrits préconisant de conserver ses lainages dans des armoires en bois de cèdre. Une croyance populaire qui a été scientifiquement confirmée en 1952 grâce aux chercheurs Huddle et Mills avec une conclusion sans appel : “Les larves exposées à 0,6 mg/l de vapeur d'huile de bois de cèdre avaient une mortalité de 91 % en une semaine. Un autre lot de larves exposées à 1-2 mg/l de vapeur d'huile de bois de cèdre a eu une mortalité de 100 % dans les 8 à 24 heures suivant l'exposition. [...] ”. À la bonne heure !
On peut trouver des bâtonnets de cèdre à visée anti-mites dans la plupart des grandes surfaces, mais ils sont généralement fabriqués à partir de bois d’Amérique du Nord puis façonnés en Chine, et c’est quand même dommage d’importer ce genre de produit quand on vit dans un pays qui regorge de forêts de cèdres (aka La France).
On a donc fait un peu de zèle chez Loom et on a conçu notre propre kit anti-mites 100% local en travaillant avec ces deux supers entreprises :
la Tabletterie des Lacs (dans le Jura) a façonné pour nous des disques en bois de cèdre issu des forêts locales qui sont perforés en leur centre pour que vous puissiez soit les suspendre à vos cintres, soit les glisser au milieu de vos piles de pulls.
L’odeur du bois de cèdre s'atténuant au bout de quelques mois, on s’est donc rapproché de la Distillerie Bel Air (dans le Gard) qui produit artisanalement de l’huile essentielle de cèdre français.
Comment réparer un vêtement troué par les mites ?
Vous vous êtes enfin débarrassés durablement des mites textiles mais il reste de leur passage chez vous quelques mailles trouées. Pour éviter que ces trous ne s’agrandissent au fil du temps, je vous conseille de les refermer proprement.
Option 1 - Do it yourself
Armez-vous de patience, d’une aiguille et de laine à repriser dans la bonne couleur comme celle-ci et suivez les instructions de cette vidéo qui explique pas-à-pas comment repriser vos pulls troués.
Il existe aussi d'excellentes formations plus poussées pour apprendre à réparer vos vêtements troués :
Vous pouvez également confier vos pulls à des artisans spécialisés sur ce sujet. C’est notamment le cas de Julie, la créatrice de La Clinique du Pull qui est basée à Paris mais à qui vous pouvez envoyer vos pulls par la Poste. Elle en fera des merveilles, la preuve en images :
Pour un reprisage invisible maille à maille comme celui sur la photo ci-dessus, il faut compter une dizaine d’euros par trou. Le résultat est totalement invisible mais si une mite a fait un festin de votre pull, l'addition peut vite être salée.
Si votre budget est plus réduit ou si votre pull est tellement troué qu’il ressemble à une meule d’Emmental de Savoie I.G.P, il existe l’option “tamponnage” qui est plus simple à effectuer que la précédente : Julie noue ensemble tous les fils dévorés par la larve de mite afin d’empêcher au trou de s’agrandir, puis recouvre la zone avec du feutre de laine pour cacher et solidifier la zone. Cette technique coûte quelques euros par trou à reboucher. J’ai personnellement opté pour un tamponnage visible avec de la laine colorée, mais il est totalement possible de lui demander un tamponnage ton-sur-ton si vous n’avez pas envie de ressembler à une coccinelle sous exta vue par un daltonien.
Big up à la clinique du pull !
Voilà, vous savez à peu près tout sur les mites, leurs larves, les forêts de cèdre Français et la réparation par tamponnage. Prenez soin de vos pulls en laine et surtout : sus aux mites !
Qui suis-je pour vous parler d’entretien de vos vêtements ? Je m’appelle Claire et je suis en charge de suivre la production chez Loom. En gros, j’essaye d’éviter les ruptures de stock sur notre site (bon c’est pas encore parfait, mais j’y travaille) et je m’assure tout au long des étapes de fabrication que les vêtements sont conformes à nos exigences de qualité. En plus de ça, je suis passionnée par tout ce qui permet d’allonger la durée de vie de nos vêtements : entretien, réparation et autres astuces de grand-mère. J’aime donner des “petits suppléments d'âme” aux vêtements, les retravailler, les réparer, leur redonner une chance quand plus personne ne veut d’eux. Sur ces pages, j'essaierai de vous transmettre ce que je sais et qui pourrait vous être utile. Dernière chose : toutes les astuces que vous trouverez sur ce site, je les ai vraiment testées et je me suis assurée personnellement qu’elles marchent (en d’autres termes, ce n’est pas un copié-collé de recherches sur internet). Si vous en avez des nouvelles à me suggérer, n’hésitez pas à laisser un commentaire en dessous de cet article.
23 mai 2022. On appuie sur le bouton qui envoie la newsletter annonçant la sortie de notre jean bleu homme. A première vue, rien de révolutionnaire pour une marque de vêtements. Sauf que ce jean, il est un peu spécial : il devrait trouer moins vite que les autres à l’entrejambe. Pour en arriver là, on a travaillé pendant trois ans, inventé un nouveau test d’usure avec notre laboratoire et fini par développer notre propre tissu dans les Vosges. On vous emmène avec nous.
Les trous à l'entrejambe, la maladie des jeans
Avant de se lancer dans la fabrication de notre jean, on vous avait envoyé un petit questionnaire : “C’est quoi le problème avec vos jeans en général ?”. Et à question simple, réponse simple : le problème, c’est les trous à l’entrejambe.
On a reçu ça x500.
Eh oui : quand on marche, la cuisse frotte contre l’autre cuisse (ou plutôt : contre le bas de la fesse), ce qui fragilise le tissu du jean puis finit par le trouer.
Pour fabriquer le nôtre, il fallait donc d’abord comprendre pourquoi certains jeans trouent plus vite que d’autres. Notre premier réflexe : écumer les centaines d’articles sur internet consacrés au “crotch blow out” (c’est comme ça qu’on dit “trou à l’entrejambe” au pays du jean) et à sa (ses ?) cause. Mais sur les sites et forums américains, personne n’était d’accord : toile trop fine, présence d'élasthanne, coton de mauvaise qualité, coupe trop serrée, coutures trop épaisses, humidité liée à la transpiration…
Les Américains ils ont inventé ChatGPT, mais pour la solution aux trous des jeans, ils cherchent encore.
Mais alors… comment tirer ça au clair ?
Un jour, on a eu une révélation : la vérité sur les trous des jeans se cache très probablement… dans les chinos. Eh oui, notre chino Loom, on le vend depuis 2019 et on est sûrs d’une chose : on ne nous a presque jamais remonté de trous à l’entrejambe, et les rares clients à avoir percé cette zone font un usage intense du vélo ou de la moto - bref, nos chinos ne trouent pas à cause du frottement de la marche.
C’est pas Taor (notre mannequin qui porte le chino) qui vous dira le contraire.
La question était donc tout simplement : quelles sont les spécificités du jean par rapport un à chino qui pourraient expliquer la formation de trous à l’entrejambe ?
A la recherche du coupable
Cette question nous a permis de d’éliminer la plupart des hypothèses trouvées sur ces sites américains :
Les jeans trouent parce qu'ils sont trop fins : non, un chino est généralement plus fin qu’un jean.
Les jeans trouent parce qu’ils sont trop serrés aux cuisses : non, à l’entrejambe, les jeans et les chinos ont à peu près la même coupe.
Les jeans trouent à cause de facteurs exogènes (humidité liée à la transpiration, tension quand on bouge…) : non, a priori on fait à peu près la même chose avec un jean qu’avec un chino.
Les jeans trouent parce qu’ils ont de l’élasthanne : non, comme la plupart des jeans, la plupart des chinos contiennent un petit pourcentage d’élasthanne pour le confort.
Les jeans trouent parce que leur coton est de mauvaise qualité : non, il n’y aucune raison pour que les fibres de cotons utilisées dans les jeans soient plus courtes ou de moins bonne qualité que celles utilisées dans les chinos.
Les jeans trouent parce que leurs fils sont de moins bonne qualité : non, même s’il est vrai que dans les années 70, une partie des jeans étaient tissés avec des fils dits “open-end” (moins chers et peut-être moins résistants à l’abrasion), 95% des jeans sont aujourd’hui tissés avec des fils traditionnels “ringspun”, comme les chinos.
Il nous restait donc seulement deux hypothèses à tester :
Hypothèse n°1 : la couture double. La couture intérieure de la jambe des jeans est plus épaisse que celle des chinos – une couture double qui pourrait causer des frottements plus intenses que sur les chinos.
Suspect n°1 : la couture double du jean, peut-être coupable malgré son air innocent.
Hypothèse n°2 : la rugosité. Les fils des jeans sont plus gros que ceux des chinos : leur tissu est donc plus rugueux. Quand une cuisse frotte contre l’autre, c’est un peu comme si un papier de verre frottait le tissu.
Suspect n°2 : la rugosité du jeans (pas ce gentil petit cheval).
Nos tests en laboratoire
Pour tester nos hypothèses, on a décidé de simuler les frottements avec notre laboratoire (SMT), lors un test dit “Martindale” : une machine frotte le tissu jusqu’à ce qu’un trou apparaisse. Le résultat se compte en nombre de cycles : plus le nombre est élevé, plus le tissu est résistant.
Une machine Martindale en action.
Pour commencer, on a voulu vérifier que le test Martindale simule bien ce qui se passe dans la vraie vie : on a donc testé un tissu de jean et un tissu de chino pour vérifier qu’en labo aussi, le jean troue plus vite que le chino.
Mais quand on a reçu les résultats, surprise : en laboratoire, le jean avait tenu deux fois plus longtemps que le chino (100 000 vs. 50 000 cycles). Le contraire de ce qui se passe dans la vraie vie…
Alors on a réfléchi deux secondes (ok, plutôt deux semaines) : ce test Martindale ne peut pas simuler ce qui se passe réellement à l’entrejambe, puisqu’il utilise la même matière standard pour frotter contre le tissu. Or, quand on marche, c’est le tissu qui frotte contre lui-même ! On a appelé notre labo et imaginé ensemble un autre type de test où on remplace la "laine abrasive" standard par le tissu lui-même. Après quelques ajustements sur le bon niveau de pression, ce test répondra au doux nom de “Résistance à l'abrasion des étoffes méthode Martindale modifiée tissu contre tissu, pression 12 kpa”.
Quelques jours plus tard, les résultats du nouveau test tombaient :
Bingo ! On avait trouvé un test laboratoire qui simule bien ce qui passe dans la vraie vie : le chino résiste (au moins) trois fois mieux que le jean aux frottements : 100 000 vs. 35 000 cycles.
On pouvait donc passer à l’étape suivante : tester nos deux hypothèses pour trouver la cause de ces trous intempestifs sur vos jeans.
Pour tester la première hypothèse (la couture double du jean), on a remplacé le tissu simple par un tissu avec couture sur la machine Martindale… Quand on a reçu les résultats, on s’est aperçu que ça ne changeait rien : la couture ne fragilise pas le tissu. Reconnue non coupable.
Pas d’apparition de trous au bout de 100 000 cycles.
Par élimination, il ne restait donc qu’un seul coupable potentiel : la rugosité. Pour vérifier cette hypothèse, on a décidé de faire tester plusieurs types de jeans : des plutôt lisses et des plutôt rugueux. Et tous les résultats nous ont confirmé que plus le jean est épais et rugueux, plus il troue vite :
Un jean le plus fin qu’on ait trouvé (marque Muji) résiste hyper bien : il dépasse les 100 000 cycles haut la main.
Un jean brut assez épais (marque Uniqlo) ne résiste pas très bien : 35 000 cycles. Par contre, quand on rend la toile moins rugueuse manuellement avec du papier de verre avant de l’envoyer à tester, il tient beaucoup mieux et dépasse aussi les 100 000 cycles !
Un jean assez rugueux à cause de l’utilisation d’un fil “open end” ne tient pas très bien : 16 000 cycles seulement.
Un jean brut et son équivalent délavé (et donc moins rugueux) : le premier tient 70 000 cycles, beaucoup moins que le second qui rompt à 100 000 cycles.
Bref, après plusieurs mois d’essais (et quelques milliers d’euros dépensés…), on avait enfin identifié le coupable : la rugosité. Exactement le contraire de ce qu’on aurait pu penser intuitivement : un jean de cow boy bien épais risque de trouer plus vite à l’entrejambe qu’un jean tout fin.
S'ils avaient su, tous les cowboys auraient porté des pantalons de yoga.
Et maintenant, ne restait plus qu’à développer notre tissu. Deux options s'offraient à nous.
Tester plein de tissus existants chez les fournisseurs et choisir le meilleur.
Développer le nôtre : plus incertain, plus lent, plus cher… mais avec l’espoir de créer un tissu peut-être plus performant que ceux qui existent déjà !
Vous devinez déjà ce qu’on a choisi, non ?
Direction les Vosges
Pour trouver une usine qui accepte de faire un tel développement avec nous, il fallait se lever de bonne heure. C’est du temps, de l’argent et on n’est pas Levi’s. Au départ, on espérait commander max 10 000 mètres de tissu par an, soit un peu plus de 100 000€… Économiquement pas très intéressant pour un industriel.
Pourtant, Tissage de France, l’usine des Vosges qui fabrique le denim de la marque 1083, a tout de suite accepté de travailler avec nous sur ce projet. Le deal : on partage les coûts de développement et si ça marche, l’usine pourra réutiliser tout ce qu’on a appris ensemble dans d’autres projets avec d’autres clients (c’est déjà ce qu’on avait fait avec succès lorsqu’on a développé nos chaussettes).
Nous dans les Vosges avec Tissage de France(6 indices sur cette photo vous permettront de retrouver l’année de notre visite).
Pour développer un tissu denim pas trop rugueux mais qui garde quand même une belle tenue, on a décidé ensemble de tisser :
Un denim pas trop épais (poids de 12 oz),
... avec un fil dit “ringspun” (plus doux que son équivalent “open-end”),
... issu de coton peigné (dont on a retiré les fibres les plus courtes pour plus de douceur et de résistance, ce qui est normalement réservé aux t-shirts ou aux chemises pour lesquels on recherche de la douceur)
... et le tout en coton bio, bien entendu.
Mais on ne n’est pas arrêté là : on voulait aussi résoudre le 2e gros problème remonté dans notre questionnaire : le fait que les jeans se détendent et finissent par prendre une taille. Pour ça, au lieu de filer l’élasthanne en même temps que les fibres de coton (la méthode classique dite “corespun”), Denis, le directeur de l’usine, nous a recommandé de retordre deux fils de coton autour d’un filament d'élasthanne (la méthode “guipée”, plus chère mais a priori plus efficace).
A gauche : la méthode “corespun”, à droite la méthode “guipée”.
Il nous a fallu quelques essais pour faire les derniers ajustements (notamment sur la taille du fil d’élasthanne), et enfin : on a réussi à tisser un denim qui tient la route. La preuve :
Sur le test qu’on a inventé (abrasion tissu contre tissu), notre jean dépasse les 200 000 cycles ! Au-delà donc de tous les jeans qu’on a pu tester.
Sur le test de déformation résiduelle, l’allongement résiduel après 1 minute est de seulement 1,8%, ce qui est tout à fait honorable : sur les 6 autres jeans que nous avons testé, un seul a fait mieux.
Oui mais si c’est pour faire un denim solide mais moche, ça ne sert pas à grand-chose, n’est -ce pas ? Bonne nouvelle, notre tissu ressemble à ça :
Un denim avec juste ce qu’il faut d’aspérités (notamment grâce à l'élasthanne guipé) pour lui donner du caractère.
C'est dans la poche
Avec le développement du tissu, on avait fait le plus gros. Parce que pour confectionner le jean, on savait à qui s’adresser : 5D, notre usine portugaise géniale spécialiste des pantalons (et qui fabrique pour plein de chouettes marques françaises).
Une usine tellement chouette que Le Monde a même fait un reportage sur eux en 2022.
Comparé à celui de notre tissu, notre cahier des charges pour la confection était assez simple… On voulait :
Une coupe semi-slim.
Des poches assez profondes pour votre téléphone et assez solides pour vos clefs.
Une braguette zip parce que c’est plus pratique et que ça délave plus joliment.
Un premier prélavage sur le jean brut pour ne pas qu’il rétrécisse chez vous.
Des passants de ceinture renforcés.
Après quelques allers-retours sur la coupe, on tenait notre jean ! Beau, confortable et solide. C’était parti pour la première production.
Séance d'essayage concluante.
Parenthèse : ouille le prix Ce jean, on le vend 100€. Oui, c’est pas donné… mais ce n’est pas si cher que ça. D’abord, la phase de développement nous a coûté pas mal d’argent : entre les tests labos, le développement d’essais de tissage et les allers-retours sur les prototypes, on en a eu pour une dizaine de milliers d’euros (sans compter notre temps de travail). Ensuite, le tissu coûte environ 15€/m à produire, soit presque deux fois plus cher que les toiles classiques made in Italy : coton bio, filature ringspun, coton peigné, fil d'élasthanne guipé plutôt que corespun, made in France… notre éthique et nos choix de qualité ont un coût. Enfin, la confection est soignée et made in Portugal, avec donc des salaires bien plus élevés que 95% des jeans du marché, fabriquées majoritairement en Asie ou au Maghreb. Mais comme on ne fait ni collection, ni soldes, ni pubs, et que nos actionnaires ne nous poussent pas à faire une grosse marge (plus de détails ici), on ne le vend “que” 100 euros (pour l’instant - ce prix pourra changer avec l’inflation sur l’énergie et les matières premières).
Solide mais pas increvable
Cela fait bientôt un an qu’on a lancé ce jean : on commence à avoir du recul sur la façon dont il vieillit. D’abord, les personnes qui l’ont acheté ont l’air très satisfaites : il est noté 4,7/5 par plus de 100 personnes, c’est vraiment génial.
Des compliments qui nous remplissent de joie - et nous inquiètent un peu pour la vie sociale de ce Guillaume.
Ce jean résistera-t-il aux trous à l’entrejambe pour l’éternité ?
Non.
D’abord, sur plus de 2000 jeans vendus, on a déjà eu 3 remontées de trous : des gens qui avaient une pratique régulière du vélo ou de la moto. Or, on a conçu ce jean pour bien résister aux frottements “cuisse contre cuisse”… mais il ne sera pas beaucoup plus résistant que les autres jeans pour les frottements “cuisse contre selle” (même si à chaque fois, les clients concernés nous ont dit qu’ils avaient troué leur jean Loom moins vite que les autres).
Et même pour les frottements liés à la marche classique, s’il résistera probablement plus longtemps que la moyenne, il est très probable qu’il finisse lui aussi par trouer un jour : bref, comme n’importe quel vêtement en matières naturelles, ce jean finira par s’user.
Est-ce qu’on pourrait fabriquer un jean encore plus résistant ?
Impossible, à moins d'utiliser beaucoup de matières synthétiques : pour augmenter la résistance d'un vêtement, le plus simple reste de remplacer le coton par du polyester. Problèmes : ce n'est pas agréable au porter, ça retient les odeurs et surtout, on pense qu'il y a urgence à ce que la mode se désintoxe de son addiction au plastique (on vous en parle dans cet article).
Ces trous, est-ce si grave ?
Pas tant que ça. Parce que comme tous les vêtements, un jean, ça se répare. En fait, les jeans se réparent même plus facilement que les autres vêtements. D’abord, leur alternance de fils bleus et blancs fait qu’ils sont peu uniformes visuellement… et que les réparations peuvent donc être quasi-invisibles. Pour les trous à l’entrejambe, on peut donc ajouter un patch de tissu à l’intérieur du jean au niveau du trou puis le recoudre avec un fil de la bonne couleur… Et voici le résultat :
Une réparation qui coûte entre 20 et 30€ et que la plupart des ateliers de retouche-couture savent très bien faire.
En plus, même si la réparation se voit un peu, ce n’est pas si grave : les experts du denim considèrent que ce qui fait la beauté d’un jean, ce sont les marques de ce qu’il a vécu. Le délavage (on a d'ailleurs fait tout un article sur le sujet), les accrocs, les réparations, bref, la “patine” sont autant de cicatrices qui lui donnent de la valeur – et que plein de marques essayent d’ailleurs de reproduire artificiellement en usine.
La marque A.P.C vend même des jeans "usés naturellement" plus chers que ses jean neufs.
Conclusion : ne nous trompons pas de combat
Si notre jean finira par s’abîmer et qu’il se répare relativement facilement, est-ce que ça valait le coup de s’embêter autant ?
On espère que oui : si le premier trou à l’entrejambe apparaît un ou deux ans plus tard que d'habitude, c’est toujours ça de gagné. Et puis, pour développer ce jean, on a dû comprendre la science derrière les vêtements, et ça, ça nous anime vraiment. Enfin, soutenir les usines françaises en faisant de la R&D avec eux, c’est une mission qu’on trouve noble et passionnante.
Mais il faut rester lucide : le vêtement inusable, ça n’existe pas… et ça n’existera jamais. Le plus important pour garder un vêtement longtemps, ce n’est pas sa qualité intrinsèque : c’est surtout comment on en prend soin. Les vêtements de nos grands-parents étaient sans doute bien moins résistants que ceux d’aujourd’hui. Pourtant, ils les gardaient beaucoup plus longtemps. Parce qu’ils savaient les entretenir, les réparer, les raccommoder.
A notre tour, il faut qu’on réapprenne collectivement à prendre soin de nos vêtements. Mettre une serviette avant de manger des pâtes à la tomate, raser les bouloches de ses pulls ou de ses chaussettes, laver délicatement ses pulls en laine, recoudre nos boutons, réparer les accrocs… et raccommoder les trous à l’entrejambe de nos jeans.
Bref, des vêtements qui durent longtemps, ce sont surtout des vêtements qui vieillissent bien.
Achetons-en moins, prenons-en soin.
Mise à jour mars 2024
Le tissage de ce jean est désormais réalisé en Italie (et non plus en France). Hélas, en France, les minimums de commande étaient trop élevés et les délais de production trop longs pour nous. Dans une période compliquée pour les marques éthiques et où notre trésorerie est limitée, nous avons opté pour un denim italien (chez Candiani, un tisseur réputé). Pour garder un tissu qui résistera longtemps aux trous à l’entrejambe comme notre tissu français, nous en avons fait passé plusieurs au test d’abrasion que nous avions inventé avec notre laboratoire (plus de détails ici). On espère un jour pouvoir revenir à notre tissu français.
Le tissu italien est à peu près du même poids que le tissu français. Il est légèrement plus élastique, ce qui lui apporte un peu plus de confort et fait qu’il se détend un peu plus au fil des portés.
Avantage du savoir-faire italien : la couleur brut ne dégorge plus
Qui on est pour dire ça ? Vous êtes sur La Mode à l’Envers, un blog tenu par la marque de vêtements Loom. L'industrie textile file un mauvais coton et c'est la planète qui paye les pots cassés. Alors tout ce qu’on comprend sur le secteur, on essaye de vous l’expliquer ici. Parce que fabriquer des vêtements durables, c’est bien, mais dévoiler, partager ou inspirer, c’est encore plus puissant. Si vous aimez ce qu’on écrit et que vous en voulez encore, abonnez-vous à notre newsletter en cliquant ici. Promis : on écrit peu et on ne spamme jamais.
Cela peut sembler surprenant mais si on parle juste d’argent, ouvrir une boutique, ce n’était pas forcément une bonne idée pour nous. Certes, pour les marques nées sur internet, c'est assez tentant d’avoir pignon sur rue : dans une boutique, les gens viennent gratuitement, alors que pour les faire venir sur un site de e-commerce, en général, il faut faire de la pub. Dans la rue, pour se faire connaître, il suffit d’avoir une jolie vitrine et d’être au bon endroit. Alors c'est vrai que ça coûte un peu de sous au départ (joie des “fonds de commerce” et des travaux) mais sur le long terme, ça revient moins cher que les dépenses marketing en ligne.
Oui mais voilà, avec Loom, on a la chance de ne pas avoir besoin de faire de pub : tous nos clients viennent par bouche-à-oreille (ou parce qu’ils ont entendu parler de nous dans les médias). Alors forcément, le choix d'ouvrir une boutique est moins évident pour nous. C’est d’ailleurs une question qu’on nous a posée à chaque rendez-vous avec les banques : “Pourquoi vous embêter avec une boutique alors que votre business en ligne est rentable ?”.
Et c’est vrai vendre en magasin, c’est beaaaaucoup plus compliqué que de vendre en ligne : dégâts des eaux, vols, travail le week-end etc… Alors qu'en ligne, on reste tranquillou derrière notre ordi.
Notre vie avant de décider d'ouvrir la boutique.
Si on s’est décidé à avoir un magasin, ce n’est pas par masochisme : il y a pleins d'avantages, pour nous comme pour vous. D'abord, parce que c'est génial d'imaginer une boutique : on découvre un nouveau monde, on apprend plein de trucs et on décide ce qu'on y met, ce qu'on ne veut pas. Et puis, pouvoir vous rencontrer en chair et en os, entendre vos histoires et vos blagues sur nos vêtements, ça n'a pas de prix.
De manière plus pragmatique, une boutique, cela va vous permettre d’essayer, toucher et voir nos vêtements avant de les acheter. Finis les échanges de colis parce que la taille n’est pas la bonne ou parce que la couleur ne rend pas pareil que sur le site. Ça fait des économies pour nous, et c’est moins de galères pour vous.
De notre côté, on pourra se rendre compte de comment nos vêtements vous vont en vrai. Et vous pourrez nous dire directement ce qui vous plaît et ce qui ne va pas : on va apprendre plein de nouvelles choses pour améliorer nos vêtements, des choses qui ne se disent pas sur les messageries ou avec des sms et qu’on n’aurait jamais pu comprendre autrement.
Ça serait plus facile de nous expliquer si on était face à face.
Bref, on pense que cette boutique va nous permettre de fabriquer de meilleurs vêtements. Et si on pense "long terme", faire de meilleurs vêtements, c'est bon pour notre business.
Une France de commerçants, pas de livreurs
L’autre raison qui nous donne envie de d'ouvrir un magasin physique, c’est qu’on se rend compte qu’avec la montée des ventes en ligne, ils sont de plus en plus nombreux à disparaître. Selon cette étude, la croissance du e-commerce a entraîné la destruction de 114 000 emplois entre 2009 et 2018. Pour, à la place, embaucher… des livreurs. Aujourd’hui en France, livrer, c’est un job mal payé, mal protégé et risqué. Certes, on entend souvent parler de ce que fait Amazon, mais on retrouve des conditions difficiles chez toutes les entreprises de livraison : par exemple, les livreurs Colissimo de la région parisienne sont à 85% des sous-traitants, obligés parfois de faire du 5h-20h pour finir leur tournée. Chez Loom, comme on ne peut pas livrer nous-même les produits commandés en ligne partout en France, on délègue l’activité de livraison. Bref, on doit être lucide : on participe à ce système.
Ce film raconte la vie d’un livreur au Royaume Uni. Impossible de le regarder sans pleurer.
Et puis, au-delà des conditions de travail des livreurs, il faut bien admettre que la disparition des petits commerces pose de graves problèmes dans les villes. Avec toutes ces vitrines vides et ces rideaux baissés, les centre-villes se désertifient. Avec pour conséquences une perte de qualité de vie pour les habitants, un sentiment d’abandon et une montée de l'extrême droite (cf. cet article). Les commerces ne sont pas que des lieux de transaction financière, ce sont aussi des lieux de vie sociale extrêmement importants pour les villes. Certes, cette dévitalisation urbaine n’est pas nouvelle et est d’abord liée au développement des zones commerciales de périphérie, mais on n’a pas trop envie que le e-commerce finisse le travail.
"Euh vous ouvrez une boutique au centre ville de Paris et vous prétendez sauver les petits commerces et revitaliser les centre-villes abandonnés ?"
Non, on est bien conscients qu’ouvrir un magasin à Paris ne changera pas grand-chose. D’ailleurs, même si cette boutique cartonne, on fera encore la majorité de nos ventes sur internet. Mais on espère que c'est un premier pas vers un autre modèle...
Vive les commerces indépendants !
Récapitulons : à l'avenir, si cette première boutique tourne (ce qui n’est pas encore gagné), on voudrait vendre plus en ville et moins en ligne. Et plutôt dans les villes où il n'y a plus beaucoup de magasins.
Alors, comment pourrait-on s'y prendre ?
En gros, on a deux options.
La première option, ce serait d’ouvrir des boutiques Loom dans plein de villes. Bof. Aujourd’hui, quand on se balade dans les centre-villes, on retrouve partout les mêmes enseignes qu’on soit à Bordeaux, Lyon ou Clermont-Ferrand (les franchises représentent déjà plus de 60% des commerces dans les grandes villes) et on pense que cette uniformisation des villes est un peu triste. Et à nouveau, il faut qu’on soit lucide : ça ne change pas grand-chose que ces boutiques soient des H&M, des Mango ou des Loom. Ce qui fait l’âme d’une ville, ce sont les petits commerces indépendants : ceux qui ont monté leur affaire, qui connaissent les clients et clientes et qui font, par définition, que leur ville ne ressemble à aucune autre.
Alors notre vision à long terme, ce serait plutôt de proposer nos vêtements Loom via des revendeurs multimarques indépendants, comme le font par exemple Patagonia ou Veja. Pour l'instant, on ne peut pas se le permettre car notre marge est trop petite pour pouvoir rémunérer convenablement des éventuels revendeurs. A l’avenir, on espère pouvoir changer cela, non pas en augmentant le prix de nos vêtements mais parce qu'on aura déjà rentabilisé tel ou tel investissement, qu'on aura moins besoin d'argent pour faire tourner notre entreprise et qu'on pourra donc laisser à ces commerces de centre ville suffisamment d'argent pour qu'ils assurent la commercialisation de nos vêtements.
Une boutique chelou in Paris
“Franchement, cette couleur ne vous va pas”
Même si on ouvre notre boutique, notre credo reste le même : ne pas vous faire acheter des choses dont vous n’avez pas besoin. Comment on fait ? D’abord on y applique les mêmes règles que sur notre site : pas de collections, pas de soldes, pas de promos, pas de prix en 9,99… Et puis, on a revu le mode de rémunération de l'équipe en boutique. Généralement, quand on travaille en magasin, plus on vend, plus on touche de primes. Ce système peut encourager à vendre des vêtements à tout prix... On a préféré indéxer la part variable de la rémunération sur les avis Google afin que le seul intérêt économique de l'équipe en boutique, c'est que vous vous y sentiez bien - pas que vous achetiez beaucoup.
Promis, ils feront tout pour vous plaire.
Bons salaires, bas prix
Dans les magasins de prêt-à-porter, les gens sont souvent au salaire minimum. Avec les loyers parisiens, c’est insuffisant pour vivre dignement. Dans notre boutique, le salaire de base pour les conseillers et conseillères de vente est donc supérieur de 20% au SMIC.
Proposer un niveau de rémunération juste, ça nous semble être la base. En plus, à moyen terme, ça a des avantages économiques pour nous : on peut recruter des personnes plus calées et motivées, qui vont mieux gérer la boutique. Et puis on espère aussi avoir moins de démissions qu’ailleurs (pour les boutiques de vêtements, c’est un gros problème, un peu comme dans les métiers de la restauration dont on parle beaucoup en ce moment).
Le problème, comme on commençait à l’expliquer plus haut, c’est que notre marge est assez faible : pour définir nos prix de vente (TVA comprise), on multiplie les coûts de production par 2,5, quand certaines marques font jusqu’à x10. Sur internet, on arrive quand même à être rentable, notamment parce qu’on ne fait pas de pub. Mais en boutique, c’est beaucoup plus compliqué. Il y a beaucoup plus de frais de personnel : il faut des gens pour vous conseiller, vous encaisser, replier les vêtements que vous avez essayés… Autant de tâches qui n’existent pas sur un site web.
Alors si on met tous ces paramètres en équation, on se rend compte qu’on a un petit problème d’équilibre économique.
Une boutique en self-service
Pour que notre projet tienne la route économiquement, on a fait un choix qui pourrait paraître un peu surprenant : on a pensé notre boutique pour qu’elle soit “self-service”, c’est-à-dire que vous pourrez y être relativement autonomes. Alors une fois n’est pas coutume, on fera comme dans les boutiques de fast fashion : chez nous, toutes les tailles seront disponibles sur les étagères. Par exemple, si vous voulez essayer votre jean brut en taille 31, vous pourrez vous servir sans être obligé de demander à quelqu’un d’aller chercher votre taille dans les stocks. D’une part, c’est plus pratique pour vous… et d’autre part, c’est moins cher en salaires pour nous. Par contre, on sera bien sûr toujours là pour vous conseiller : vous montrer comment enlever les bouloches d’un pull en laine, expliquer l’intérêt de la mercerisation sur le tissu de notre chino ou vous dire honnêtement si cette couleur vous va ou si elle vous fait le teint rougeaud.
Exemple : là, ça lui fait le teint rougeaud (source ici).
Mais la conséquence de ce choix de boutique en self-service, c’est qu’il nous fallait une surface assez grande pour y caser toutes les tailles de chacun de nos produits. Du coup, notre espace de vente fait 120 m2, quand plein de boutiques classiques peuvent se contenter de 30 ou 40 m2.
15 mètres de façade quand même… moins mais mieux SAUF QUAND IL S’AGIT DE LA TAILLE DE LA VITRINE.
En plus, on la voulait assez centrale, cette boutique, pour qu’elle soit pratique d’accès pour les gens de passage à Paris. Poussant l’originalité à son paroxysme, nous avons décidé d’ouvrir notre magasin dans un petit quartier qui monte, très peu commercial, connu des initiés sous le nom de “Marais”.
Le problème, c’est que le loyer d'une grande surface dans le Marais... ce n'est pas très abordable. Alors, on a choisi une rue très sympa mais pas très passante, beaucoup moins chère que les rues touristiques juste à côté.
Au passage, on doit avouer qu’on a eu des sacrés coups de pouce de notre écosystème pour faire des économies : pas de fonds de commerce à payer grâce à notre bailleur social, un prêt à un taux intéressant grâce à l’association Paris Initiative Entreprise et à la banque éthique La Nef, plein d’articles instructifs de l’école du recrutement, des conseils de la Fédé du prêt à porter, un stage dans une boutique APC pour apprendre le métier…
Au final, ce choix de boutique en self-service dans une rue pas trop passante, ça change pas mal l’équation qu’on vous avait présentée tout à l’heure :
Notre fibre écolo est invisible à l’oeil nu
Alors, y'a des panneaux solaires ?
Non, il n’y a pas de panneaux solaires sur les stores, nos meubles ne sont pas fabriqués en plastique recyclé, il n’y a pas de borne de recyclage et on a même installé une clim’ (pour offrir des conditions de travail convenables à l’équipe de la boutique pendant les périodes de canicule). Parce que, si on regarde les ordres de grandeur, l’écoconception d’une boutique, ce n’est pas ce qui compte vraiment si on veut réduire l’impact écologique de l’industrie textile. De la même façon que les packagings "éco-responsables" ont un impact environnemental dérisoire par rapport aux vêtements, le mobilier des boutiques a un impact négligeable par rapport aux vêtements qui y sont vendus.
Preuve irréfutable que l’impact du mobilier de la boutique c’est pas énorme.
Ce qui pollue vraiment dans une boutique d’habillement, ce sont les fringues qu’on y vend.
Ça ne veut pas dire qu’on ne fait pas attention à l’impact environnemental de la boutique : nos étagères sont en mélaminé (de la sciure recyclée et compactée), tous les gravats ont été triés et recyclés, on fermera la porte quand il fait chaud ou froid, on ne mettra jamais la clim à 18°, on a mis des stores pour limiter la chaleur en été, on n’imprimera pas systématiquement les tickets de caisse et on évitera de donner des sacs à usage unique… Mais ce qui compte vraiment, c’est qu’on a choisi des matériaux résistants et des meubles modulables pour ne pas avoir à tout refaire dans 2 ans.
Venez pour des vêtements, repartez avec des idées
Au-delà des vêtements, ce qui compte vraiment pour nous, c’est que vous repartiez de la boutique en sachant un peu plus de choses qu’en y rentrant. C’est pour ça que dans notre boutique, vous allez avoir beaucoup de lecture, avec un paquet de textes et d’explications sur notre démarche et nos produits (en particulier, l'ingénierie textile qu’il y a derrière). Et vous allez même pouvoir repartir avec de la lecture pour chez vous : on y vend nos 10 livres préférés (ou en tout cas, tous ceux qui nous ont aidés à mieux comprendre le monde et à construire Loom).
Et surtout, on a recruté une équipe différente de celles qu’on a l’habitude de croiser quand on fait du shopping, une équipe qui se forme plus aux enjeux écologiques qu’aux techniques de ventes : avec Boris, Clara et Clément, vous pourrez parler techniques textiles, réparation des vêtements, avenir de la mode ou écologie. Le temps qu’on économise grâce au caractère “self-service” de la boutique, on espère pouvoir le consacrer à discuter avec vous.
Conclusion
Si vous passez nous voir à la boutique, il est probable que vous vous disiez qu’elle n’a finalement rien d’exceptionnel. Comme notre site internet qui ressemble à celui de milliers d’autres marques de vêtements, notre boutique n’est pas très différente de celles que vous trouverez dans toutes les rues commerçantes de France : des t-shirts sur des étagères, des chemises sur des cintres, des cabines d’essayage, des personnes qui vous conseillent et rangent les vêtements. Chez nous, pas de déco ultra-stylée, pas de panneaux solaires, pas d’intelligence artificielle dans nos cabines… Nous croyons que le changement dont on a besoin dans le secteur de la mode ne requiert aucune technologie mais un retournement des mentalités : produire mieux même si cela coûte plus cher, consommer moins en renonçant à vous faire acheter des choses dont vous n’avez pas besoin.
Si vous voulez passer à la boutique, on est au 4 rue Barbette dans le 3e arrondissement de Paris et on est ouvert du mardi au samedi, de 11h à 19h30. Le samedi il y a souvent beaucoup de monde : si vous voulez être tranquille, venez plutôt en semaine.
Il arrive que nos chaussettes, socquettes et chaussettes en laine boulochent après quelques mois de port pour différentes raisons :
Sur nos chaussettes et socquettes en coton, vous pourrez constater des petites bouloches au niveau des zones de frottement, en particulier au niveau du tendon d'achille. En effet, pour retarder l'apparition des trous sur ces zones, on a ajouté un fil de polyamide plus solide. Mais la contrepartie, c'est qu'il retient des bouloches qui se seraient plus facilement détachées sur un tissu 100% coton. Bref, ces petites bouloches sont un sacrifice esthétique à payer sur l'autel de la durabilité.
Vous constaterez également des bouloches dans les zones de frottements de nos chaussettes en laine car les fibrilles de la laine s’entremêlent les unes aux autres et forment des bouloches. Bonne nouvelle : une fois vos chaussettes en laine déboulochées, vous aurez éliminé la majorité des petites fibrilles, donc les bouloches se formeront de moins en moins rapidement. On vous en parle plus amplement dans cet article.
Si ces bouloches ne vous dérangent pas (et on est plutôt de cet avis chez Loom) vous pouvez aussi les laisser vivre leur vie de bouloches : personne ne les verra à part vous et elles ne fragilisent pas vos chaussettes.
Si ces bouloches vous dérangent vous pouvez très bien les éliminer à l’aide d’un rasoir à bouloches électrique comme celui-ci à 29€ (malheureusement, on ne le trouve que sur amazon et ça nous fait bien mal au coeur) ou comme celui-ci, trouvable chez Darty où son prix oscille entre 24€ et 50€ selon les périodes. Ça n'abîmera pas vos chaussettes et ça vous prendra moins de deux minutes :
Vous commencez à nous connaître, on ne recule jamais devant l'occasion de vous montrer un avant / après satisfaisant :
Faîtes bien attention à ne pas trop appuyer le rasoir à bouloche sur votre vêtement, en particulier pour les mailles texturées. C’est le cas par exemple pour le haut de nos chaussettes qui est tricoté en point “nid d’abeille”, et dont les mailles peuvent se glisser dans le rasoir si on appuie trop l’appareil. La lame du rasoir pourrait alors couper un fil de laine et former un trou.
Qui suis-je pour vous parler d’entretien de vos vêtements ? Je m’appelle Claire et je suis en charge de suivre la production chez Loom. En gros, j’essaye d’éviter les ruptures de stock sur notre site (bon c’est pas encore parfait, mais j’y travaille) et je m’assure tout au long des étapes de fabrication que les vêtements sont conformes à nos exigences de qualité.En plus de ça, je suis passionnée par tout ce qui permet d’allonger la durée de vie de nos vêtements : entretien, réparation et autres astuces de grand-mère. J’aime donner des “petits suppléments d'âme” aux vêtements, les retravailler, les réparer, leur redonner une chance quand plus personne ne veut d’eux. Sur ces pages, j'essaierai de vous transmettre ce que je sais et qui pourrait vous être utile.Dernière chose : toutes les astuces que vous trouverez sur ce site, je les ai vraiment testées et je me suis assurée personnellement qu’elles marchent (en d’autres termes, ce n’est pas un copié-collé de recherches sur internet). Si vous en avez des nouvelles à me suggérer, n’hésitez pas à laisser un commentaire en dessous de cet article.
En 2016, c’était les débuts de Loom et on voulait créer la chemise qui n’aurait pas les problèmes des autres chemises. Et ce que nous remontaient les gens, c’est que la première raison pour laquelle on jette ses chemises blanches, ce sont les tâches. La solution paraissait évidente, il fallait fabriquer…
Cliquez ici pour voir comment on s’amusait bien à l’époque.
Août 2017. Le site BonneGueule, référence de la mode masculine en France, sort un article où sont comparées les chemises de différentes marques. Dont notre chemise intachable. Et leur analyse fait mal :
Aïe.
Ouille.
Ouch.
Ouin ouin.
Bouhou !
Bref, notre chemise n’était vraiment pas top. Et en plus de ça, on avait affirmé des choses complètement fausses.
Peut-être que vous êtes tenté de nous laisser le bénéfice du doute, vous vous dites que BonneGueule s’est trompé, ou a été particulièrement dur avec nous ? Vous êtes vraiment sympa mais on a dû se rendre à l’évidence : toutes leurs critiques étaient bien justifiées.
Partie 2 : On remet tout à plat
Un nouveau confectionneur
La première chose qu’on a fait, c’est écrire à notre confectionneur de chemise : comment ça on n’a pas des boutons en nacre ? Comment ça nos coutures ne font pas 7 points par centimètres ?
On se rend compte alors que ces “manquements” sont en partie de notre faute : on n’avait pas été assez clairs dans nos demandes écrites.
On revoit donc notre manière de travailler avec nos usines : dorénavant, on enverra un fichier très spécifique qui précise tous les détails des vêtements qu’on produit : un “techpack” comme on dit dans le milieu. Et on change bien sûr la page de cette chemise sur notre site, en enlevant toutes les promesses injustifiées.
Un exemple de fichier qui précise à nos usines à quoi doivent ressembler nos vêtements. On appelle ça un “techpack”.
Mais on se rend aussi compte qu’on n’est pas les seuls fautifs dans l'histoire : quelques semaines plus tard, ce même confectionneur nous livre une cargaison de chemises avec des erreurs de mesures dans tous les sens. On comprend alors que la production a été sous-traitée à une autre usine, qu’on ne connaît pas.
La confiance est rompue, on décide donc d'arrêter de travailler avec lui et de partir à la recherche d’un nouveau partenaire. Plusieurs personnes de confiance nous redirigent vers Supercorte.
Comment savoir si cette usine fait de la bonne qualité ?
En regardant la liste de ses clients : Supercorte bosse plutôt avec des marques haut de gamme, voire de luxe.
En discutant avec eux : pour le coup, on a la sensation de parler le même langage de qualité.
En regardant la qualité des productions : tous les prototypes qu’ils nous fabriquent sont nickels.
En regardant leurs prix : les chemises nous coûtent un peu plus cher qu’avant. Normal : la qualité, ça se paye.
Des contrôles qualité
Pendant longtemps, on ne contrôlait que les prototypes, et pas les vêtements issus de nos grosses productions. Pourtant, quand on est attaché à la durée de vie des vêtements, la conformité à un tableau de mesure par exemple, est aussi importante que la solidité d’un tissu : si une chemise est trop étroite de 2 cm aux épaules, elle n’est pas portable. On a donc mis en place tout un tas de choses pour minimiser ces risques de “non-conformité” : tests, contrôles des mesures… et recrutement d’une personne spécialement dédiée à ce sujet.
Plus un danger public
Parmi tous les critiques difficiles à lire de l’article, la plus inquiétante était quand même celle sur la matière :
Tout ça laisse penser que cette matière “intachable” contient des additifs chimiques pas tops du tout. Certes, ce tissu respectait bien la norme REACH exigée pour fabriquer et vendre des produits dans l’Union Européenne (norme que tout le monde ne respecte pas, en particulier Shein comme l’a montré ce documentaire).
Pourtant, on dirait que ce tissu est clean non ?
Mais pour être absolument certains d’avoir un tissu inoffensif, on aurait dû demander la norme dite “OEKO-TEX” - ce qu’on exige désormais pour chacun de nos tissus.
En creusant ce sujet, on a compris qu'il valait mieux éviter tous les traitements censés donner certaines “super-propriétés” aux tissus : ils sont souvent à base de composés chimiques pas très cool, comme les “PFC” qui peuvent contaminer l’environnement pendant des siècles et qui ont des effets encore incertains sur la santé humaine (les fameux perturbateurs endocriniens…).
On a donc décidé d'arrêter de produire cette chemise intachable. Et puis, on s’est interdit tout ce qui est traitements “repassage facile” sur nos chemises, propriété “anti-odeur” sur les chaussettes, apprêt “séchage rapide” sur le tissu de notre maillot de bain… Est-ce que ça vaut le coup de risquer sa santé pour trois minutes de repassage de moins ?
De la connaissance textile
Cet article de BonneGueule, au même titre que les retours de nos clients, ont fait tomber une de nos croyances : pour faire des vêtements de qualité, on ne peut pas accorder une confiance aveugle aux usines.
Les gens en usine font un travail très difficile et d’une grande valeur, mais ils sont loin de tout savoir. En particulier, contrairement aux marques, ils ne savent pas forcément comment les vêtements vieillissent. Chez Loom, on demande systématiquement à nos clients ce qu’ils pensent de nos vêtements un an après les avoir achetés. On connaît donc tous les points potentiels de fragilité et on sait souvent mieux que les usines sur quoi il faut être vigilant. Par exemple, sur un t-shirt, notre expérience nous a appris à faire très attention à la déformation. Et s’il est foncé, on sait qu’il faut être vigilant sur la tenue des couleurs car elles peuvent délaver avec le soleil et la transpiration.
Bref, si on veut vraiment améliorer la qualité de nos fringues, il est primordial de comprendre la science derrière la qualité des vêtements : la maîtrise technique doit aussi être de notre côté.
Et on s’y attelle tous les jours dorénavant, en lisant des études, des livres, en discutant avec les directeurs techniques des usines, les responsables de qualité d’autres marques, en faisant nos propres tests….
On a même un fil sur notre messagerie interne où on note TOUT ce qu’on apprend.
Aujourd'hui, à chaque fois qu'on apprend quelque chose sur la qualité des vêtements, on essaie de croiser les sources et de ne pas prendre seulement les chiffres ou les informations qui nous arrangent. A tel point que c’est devenu un de nos principes de communication :
Point n°7 de notre bible éditoriale.
Avec cette nouvelle manière de faire, on a re-questionné point par point ce qu’on prenait pour acquis sur les chemises ("est-il vrai que tel détail apporte de la solidité ?"). Et ça nous a conduit à faire pas mal de changements.
D’abord, on a décidé de ne pas utiliser de boutons en nacre : c’est vrai que cette matière est très belle (c’est pour ça qu’on en retrouve sur les chemises haut de gamme), mais on a constaté que ces boutons pouvaient casser en machine. On a donc opté pour des boutons en résine épais qui résisteront mieux aux lavages. Et on renforce aussi systématiquement leur fixation avec une machine Ascolite, qui entoure le pied du bouton d’un fil supplémentaire soudé à chaud (voir la machine en action ici).
Ensuite, on s’est posé la question des “hirondelles de renfort”, ces petits triangles de tissu entre l’avant et l’arrière de la chemise, censés renforcer leur solidité. On a pris une chemise de fast fashion sans hirondelles, on a tiré de toutes nos forces de chaque côté : elle n'a pas bougé. Encore un détail esthétique et non pas un élément renforçant la solidité : on a décidé de les retirer.
Une hirondelle de renfort, ça ne fait ni le printemps, ni la solidité.
Enfin, on a renoncé aux coutures anglaises et aux 7 points par cm : à une époque, il est possible que cela ait amélioré la résistance, mais aujourd’hui, les fils de couture les plus utilisés (en "polycoton'') sont particulièrement solides, rendant superflu ce genre de détails. Cela ne veut pas dire que les chemises qui ont ces coutures sont nulles, juste qu’il s’agit d’un choix esthétique et non de solidité.
Partie 3 : La rédemption
Au départ, comme vous l’imaginez, lire cet article de BonneGueule nous a un peu mis un coup.
Mais cet article nous a aussi fait du bien (c’est notre coté sado-maso) - il a été un des électrochocs nécessaires pour nous faire changer radicalement notre manière de développer des vêtements : arrêter de travailler avec des usines qui ne sont pas fiables, mieux contrôler la qualité de nos productions, vérifier ce que tout le monde prend pour acquis, développer notre connaissance textile… et enfin, arrêter de “surpromettre”.
Parce que c’est normal de ne pas arriver à faire des produits sans défaut, ce qu’on veut éviter, c’est d’affirmer qu’ils le sont. Et à l’époque, les superlatifs qu’on utilisait pour nos produits étaient prétentieux… et faux.
Oops I did it again for, I played with your heart, got lost in the game.
En fait, on était victimes de jaitoutcomprisme : quand on commence à s’intéresser à un domaine (la qualité des vêtements dans notre cas), on est souvent victime d’un biais de surconfiance.
La courbe du jaitoutcomprisme.
Dans notre cas, après avoir discuté 2h avec un directeur d’usine et lu 2 articles sur la longueur des fibres de coton, on pensait avoir craqué la recette de la longévité des vêtements. Sauf que la qualité textile est un sujet extrêmement complexe et qu’on n’aura jamais tout compris, même après une vie entière à s’y consacrer.
Notre courbe du jaitoutcomprisme à nous.
A l’époque, on promettait “les meilleurs vêtements du marché” et ça marchait : la plupart des gens ont envie d’y croire et ça faisait vendre. Mais sur le long terme, on a compris que ça créait beaucoup des déceptions : il y aura forcément un t-shirt de votre placard qui tiendra aussi bien voir mieux que votre t-shirt Loom.
On a donc renoncé à “sur-promettre” : dorénavant, on essaye d’être plus mesurés et factuels quand on vante les mérites de nos produits. Et on a même inscrit ce principe dans notre “bible éditoriale” :
Point n°17 de notre bible éditoriale.
Et finalement, cette volonté de faire les meilleurs produits du marché, et de prendre une position dominante, cela ne correspond plus à ce qu’on voudrait pour l’industrie textile : on pense qu'il faudrait un éco-système de milliers de petites et moyennes marques différentes plutôt qu'une poignée de multinationales qui dominent les autres, comme on l’avait écrit à la fin de l'article Du charbon dans le coton :
"Aujourd’hui, une poignée de marques mondiales géantes étouffent les autres avec la course aux prix bas et uniformisent les goûts vestimentaires du monde entier. Demain, elles pourraient laisser la place à des milliers de marques, plus locales, plus réfléchies, plus créatives, qui créent moins de misère et d’inégalités.
Aujourd’hui, on passe nos samedis après-midis à acheter toujours plus de fringues alors que nos placards débordent déjà, dans des rues commerçantes où l’on retrouve inlassablement les mêmes magasins, qu’on soit à Saint-Malo, Brive, Paris ou Nancy. Demain, on pourrait retrouver le plaisir de faire des achats réfléchis. De s’habiller avec des vêtements plus beaux et plus résistants. De (faire) recoudre un bouton au lieu de jeter une chemise. De découvrir une boutique qu’on n’aurait jamais vu ailleurs."
On est presque 5 ans après la publication de cet article de BonneGueule, on a revu de fond en comble notre manière de faire nos chemises, et on pense que le travail a payé :
4,7 c'est une super note.
Aujourd’hui, on est plutôt fiers des chemises Loom qu’on propose à la vente : elles sont robustes, pas mal coupées, produites localement, à un prix abordable et les clients en sont satisfaits.
Mais peut-être que dans 2 ans - avec les nouvelles connaissances textiles qu’on aura engrangées, les nouveaux retours de nos clients et clientes, les nouvelles innovations de l’industrie textile - quand on relira cet article, on se dira qu’on ne savait encore rien et qu’on était bien naïfs.
Si vous avez déjà commandé chez nous, vous savez peut-être que, un an après votre achat, on vous envoie un mail pour vous demander ce qu’est devenu votre vêtement et surtout si vous le portez encore. Parfois, vous nous dites que vous ne portez plus vos pulls parce qu'ils ont bouloché... et il n'y a rien qui me désole plus (sauf peut-être les Gargouilles ou les armoires chauffantes) parce qu’avec les bons outils, on peut enlever les bouloches hyper facilement. Et c'est que je vais vous montrer dans cet article.
Pourquoi votre pull bouloche ?
Les bouloches apparaissent sur les zones de frottement donc sous les bras, dans le bas du dos (si vous portez fréquemment un sac à dos), sur vos cols (si vous avez de la barbe)… La raison ? Avec les frottements, les fibrilles qui dépassent de la maille s’entremêlent les unes aux autres et forment des bouloches. Illustration :
Ça c'est la surface de votre pull, et les petits traits qui en dépassent ce sont les fibrilles qui deviendront des bouloches.
La bonne nouvelle, c’est que plus vous enlevez les bouloches, moins elles réapparaissent. Et oui, “déboulocher” élimine une partie des petites fibrilles qui forment les bouloches. Quand il n’y a plus de fibrilles, il n’y a plus de bouloches possibles !
Chez Loom, pour éviter au maximum ce phénomène de boulochage sur nos pulls, on procède en deux étapes :
On ne sélectionne que des laines à longues fibres - car elles comportent moins de fibrilles qui dépassent.
On teste en laboratoire (via le test Martindale) chaque laine sélectionnée pour voir comment elle résiste aux frottements. Cela nous permet d’exclure celles qui boulochent trop.
Le supplice du test Martindale, pire qu’un combat contre Cylindric le Germain.
Toute la subtilité ensuite est de trouver le meilleur compromis entre une laine plus pelucheuse qui sera douce mais qui aura plus tendance à beaucoup boulocher et une laine plus rêche qui boulochera très peu mais qui sera moins confortable.
Test des méthodes de déboulochage
Une rapide recherche sur internet vous révélera qu’il y a un paquet d’instruments qui permettent d’enlever les bouloches, du rasoir anti-bouloche électrique au peigne spécifique. Oui, mais est-ce que toutes ces méthodes marchent ? Et laquelle est la plus efficace ? La plus écolo ?
Pour répondre à nos interrogations, on a eu la chance de rencontrer Carole, une fille géniale qui tente toujours pleins de “trucs”, depuis l’étude des biais dans le recrutement jusqu’à la conception d'un quiz dédié aux calembours. Et l’un de ses “trucs”, c'est le "bouloches project". Elle en avait marre d'être obligée d'acheter des rasoirs anti-bouloche électriques made in China pour retirer les bouloches, alors elle a décidé de détourner des objets du quotidien pour voir ce qui marche le mieux.
Le banc de test de Carole : 1 - peigne à poux, 2+3 - rasoirs et tondeuses électriques, 4 - éponge côté abrasif, 5+9 - gants de gommage, 6+8+11+12+13+15 - rasoirs anti-bouloche électriques, 7 - brosse anti-bouloche, 10 - gant en caoutchouc, 14 - rasoir jetable, 16 - pierre à déboulocher
Elle a testé tous les objets qui lui semblaient pertinents et elle les a noté selon 6 critères :
Est-ce que ça enlève vraiment les bouloches ?
Est-ce que ça abîme le vêtement ?
Est-ce que le déboulochage est rapide ?
Est-ce que l’objet va tenir dans le temps - ou bien faut-il en racheter un nouveau tous les 6 mois ?
Est-ce qu’il est fabriqué localement ?
Est-ce qu’il peut servir à d’autres choses ?
Voici les résultats les plus intéressants de son comparatif :
Oubliez les pierres et brosses anti-bouloches : les tests ont montré qu’elles sont inefficaces et abîment les mailles (peut-être qu’elles fonctionnent mieux sur des tissus en laine type manteau ? Un jour, on testera ça). Même chose pour les rasoirs jetables et autres éponges abrasives.
Peigne à poux ou rasoir anti-bouloche électrique ?
Mais c’est quoi le mieux alors ? En fait : ça dépend de ce que vous cherchez.
Pour Carole qui essaye d’avoir moins d’objets chez elle, le peigne à poux est sa solution idéale : il est petit et multifonction (sauf si vous n’avez pas d’enfant à la maison, ou que vous avez la chance inouïe qu’ils soient épargnés par ce fléau des cours de récré). Même si son utilisation est un poil plus longue que celle du rasoir anti-bouloche électrique, elle le préfère car c’est un objet “low tech”. Donc un outil sans technologie très sophistiquée, qui ne risque pas de tomber en panne au bout de 10 minutes d’utilisation, qui consomme peu de ressources et qui n’est pas fabriqué à l’autre bout du monde dans des méga-usines pas forcément soucieuses des gens et de l’environnement.
Vous en trouverez dans toutes les pharmacies. Pour enlever les bouloches avec cette méthode, il suffit de peigner votre pull en positionnant le peigne parallèlement à la maille et il arrachera les bouloches telles de vilaines lentes.
En ce qui me concerne, la patience n’étant pas ma plus grande qualité, la solution que je préfère, c’est le rasoir anti-bouloche électrique. Certes, ce n’est pas une solution low tech ni multifonction, mais si vous prêtez attention à certains détails pour choisir un bon rasoir électrique (que je détaille plus bas), vous garderez votre appareil de nombreuses années sans problème.
Le rasoir anti-bouloche électrique en action.
Faîtes bien attention à ne pas trop appuyer le rasoir à bouloche sur votre vêtement, en particulier pour les mailles texturées. C’est le cas par exemple pour le haut de nos chaussettes qui est tricoté en point “nid d’abeille”, et dont les mailles peuvent se glisser dans le rasoir si on appuie trop l’appareil. La lame du rasoir pourrait alors couper un fil de laine et former un trou.
Comment choisir un bon rasoir anti-bouloche électrique
Si cet article vous donne envie d’acheter un déboulocheur électrique, on vous conseille de veiller aux points suivants :
Pas de batterie : privilégiez une alimentation sur secteur parce que les batteries de ce type d’appareils s’usent trop vite. Et optez bien pour une prise française.
Avis clients : tous les rasoirs électriques ne se valent vraiment pas, donc je vous conseille de vous fier aux avis client et d’opter pour l’appareil ayant la meilleure note.
Je suis particulièrement satisfaite du rasoir à bouloche Beautureal à 29€, malheureusement, on ne le trouve que sur amazon et ça nous fait bien mal au coeur ainsi que du rasoir à bouloche Solac, trouvable chez Darty où son prix oscille entre 24€ et 50€ selon les périodes. En revanche, je vous déconseille le rasoir Philips dont la batterie est devenue extrêmement faiblarde en moins de deux ans. J’insiste donc : privilégiez les rasoirs qui se branchent sur secteur pour prolonger la durée de vie du produit.
Malheureusement, on ne trouve pas d’information concernant le pays de fabrication des deux rasoirs anti-bouloche électriques qu’on vous recommande (ce n’est pas indiqué sur le site web de la marque, ni sur le packaging, ni sur la notice…). Comme les autres rasoirs proviennent essentiellement d’Asie, on imagine qu’il en est de même pour ces deux modèles. Si vous connaissez un rasoir anti-bouloche électrique made in Europe, faites-nous signe !
Gang of bouloches
Si vous avez lu cet article jusqu’au bout, vous faîtes désormais partie du gang des reines et rois de la bouloche. Vous verrez qu’une fois qu’on est bien outillé, on a envie de déboulocher tout ce qui nous passe par la main : tapis, rideaux, t-shirts, chaussettes… Jeter un produit car il est couvert de bouloches ne sera donc plus une option ;-)
Qui suis-je pour vous parler d’entretien de vos vêtements ? Je m’appelle Claire et je suis en charge de suivre la production chez Loom. En gros, j’essaye d’éviter les ruptures de stock sur notre site (bon c’est pas encore parfait, mais j’y travaille) et je m’assure tout au long des étapes de fabrication que les vêtements sont conformes à nos exigences de qualité. En plus de ça, je suis passionnée par tout ce qui permet d’allonger la durée de vie de nos vêtements : entretien, réparation et autres astuces de grand-mère. J’aime donner des “petits suppléments d'âme” aux vêtements, les retravailler, les réparer, leur redonner une chance quand plus personne ne veut d’eux. Sur ces pages, j'essaierai de vous transmettre ce que je sais et qui pourrait vous être utile. Dernière chose : toutes les astuces que vous trouverez sur ce site, je les ai vraiment testées et je me suis assurée personnellement qu’elles marchent (en d’autres termes, ce n’est pas un copié-collé de recherches sur internet). Si vous en avez des nouvelles à me suggérer, n’hésitez pas à laisser un commentaire en dessous de cet article.
Il arrive que nos chaussettes, socquettes et chaussettes en laine boulochent après quelques mois de port pour différentes raisons :
Sur nos chaussettes et socquettes en coton, vous pourrez constater des petites bouloches au niveau des zones de frottement, en particulier au niveau du tendon d'achille. En effet, pour retarder l'apparition des trous sur ces zones, on a ajouté un fil de polyamide plus solide. Mais la contrepartie, c'est qu'il retient des bouloches qui se seraient plus facilement détachées sur un tissu 100% coton. Bref, ces petites bouloches sont un sacrifice esthétique à payer sur l'autel de la durabilité.
Vous constaterez également des bouloches dans les zones de frottements de nos chaussettes en laine car les fibrilles de la laine s’entremêlent les unes aux autres et forment des bouloches. Bonne nouvelle : une fois vos chaussettes en laine déboulochées, vous aurez éliminé la majorité des petites fibrilles, donc les bouloches se formeront de moins en moins rapidement. On vous en parle plus amplement dans cet article.
Si ces bouloches ne vous dérangent pas (et on est plutôt de cet avis chez Loom) vous pouvez aussi les laisser vivre leur vie de bouloches : personne ne les verra à part vous et elles ne fragilisent pas vos chaussettes.
Si ces bouloches vous dérangent vous pouvez très bien les éliminer à l’aide d’un rasoir à bouloches électrique comme celui-ci à 29€ (malheureusement, on ne le trouve que sur amazon et ça nous fait bien mal au coeur) ou comme celui-ci, trouvable chez Darty où son prix oscille entre 24€ et 50€ selon les périodes. Ça n'abîmera pas vos chaussettes et ça vous prendra moins de deux minutes :
Vous commencez à nous connaître, on ne recule jamais devant l'occasion de vous montrer un avant / après satisfaisant :
Faîtes bien attention à ne pas trop appuyer le rasoir à bouloche sur votre vêtement, en particulier pour les mailles texturées. C’est le cas par exemple pour le haut de nos chaussettes qui est tricoté en point “nid d’abeille”, et dont les mailles peuvent se glisser dans le rasoir si on appuie trop l’appareil. La lame du rasoir pourrait alors couper un fil de laine et former un trou.
Qui suis-je pour vous parler d’entretien de vos vêtements ? Je m’appelle Claire et je suis en charge de suivre la production chez Loom. En gros, j’essaye d’éviter les ruptures de stock sur notre site (bon c’est pas encore parfait, mais j’y travaille) et je m’assure tout au long des étapes de fabrication que les vêtements sont conformes à nos exigences de qualité.En plus de ça, je suis passionnée par tout ce qui permet d’allonger la durée de vie de nos vêtements : entretien, réparation et autres astuces de grand-mère. J’aime donner des “petits suppléments d'âme” aux vêtements, les retravailler, les réparer, leur redonner une chance quand plus personne ne veut d’eux. Sur ces pages, j'essaierai de vous transmettre ce que je sais et qui pourrait vous être utile.Dernière chose : toutes les astuces que vous trouverez sur ce site, je les ai vraiment testées et je me suis assurée personnellement qu’elles marchent (en d’autres termes, ce n’est pas un copié-collé de recherches sur internet). Si vous en avez des nouvelles à me suggérer, n’hésitez pas à laisser un commentaire en dessous de cet article.
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